Blanche a cet âge où, paradoxalement, on veut se distinguer mais où l’on est aussi très sensible aux influences. Bien qu’amoureuse de sa solitude, complexée et peu douée pour les contacts humains, elle est avide de compagnie et se languit dans les couloirs de l’université sans jamais oser provoquer la moindre rencontre. Or voilà que la timide Blanche est un jour conquise par Christa, fille délurée qui ne s’encombre ni de préambules ni de scrupules et qui a repéré la bonne affaire. Les deux adolescentes, on s’en doute, ont peu en commun. Éprise de littérature et goûtant le silence, Blanche se retrouve rapidement envahie par celle dont elle aurait voulu se faire une amie. « Je rêvais d’être intégrée, ne fût-ce que pour m’offrir le luxe de me désintégrer ensuite. » Quel luxe, en effet, que s’est offert Blanche en ouvrant sa porte à Christa ! Rien ne lui sera épargné : Christa s’emparera de tout, elle ira même jusqu’à séduire les bons parents petits-bourgeois pour mieux la reléguer, elle, la fille indigne, au rang de moins que rien. Pour se débarrasser de cette frotte-manche, Blanche devra faire preuve d’une force de caractère peu commune.
Dans Antéchrista, Amélie Nothomb trouve le moyen à la fois de nous amuser, de nous émouvoir, de faire l’éloge de la lecture et, enfin, de nous convaincre que la non-intervention est un art qui n’est pas à la portée de tous. Nul besoin pour l’auteure de « faire long », ses courts récits sont tout simplement exquis ! Le dernier-né est sans contredit à la hauteur des précédents.