Il y a toujours quelque chose qui résiste en nous lorsque vient le temps d’appréhender notre finitude. Nous avons toutes les misères du monde à nous imaginer disparus, oubliés, exclus de la vie. Non pas de la vie qui s’en va, mais bien justement de la vie qui va, qui suit son cours en nous abandonnant derrière elle. Maintenant qu’Alain Médam a atteint l’âge de soixante-cinq ans, il ne peut ignorer l’échéance. Il entreprend dans ce livre une démarche réflexive qui le précipite dans un état de dédoublement où il est sans cesse écartelé entre l’été de sa vie, ses souvenirs de plage et de soleil, et l’instant de la maturité où s’opère le retour sur soi. Le passé lui paraît dorénavant lointain, le présent fugace, l’avenir inexorable. Le jeune homme qu’il a été s’impose à lui et le confronte à ce qu’il est devenu. Son corps, avec lequel jadis il ne faisait qu’un, accuse des ratés qui séparent le physique et l’esprit. En vieillissant l’homme se sent tiré vers l’avant ; il a plus de souvenirs que s’il avait mille ans. Les réminiscences l’assaillent dans le désordre ; elles se manifestent sous forme de flashs, d’instantanés, sans suivre d’ordre chronologique. Dans cet état ô combien inconfortable, Alain Médam fantasme que le temps suspend son vol. Il voudrait choisir un instant de vie et le revivre en pénétrant dans son passé comme dans un film, mais aucun souvenir ne se laisse saisir. L’auteur retrouve plutôt son unité par l’écriture et la peinture, par une quête de sens qu’il oriente du côté de l’esthétisme et de la création. Peut-être aussi par un ancrage très ferme dans le monde des vivants : si l’ouvrage d’Alain Médam s’ouvre sur le mot temps – le temps qui fait son œuvre, le temps ennemi mortel de ceux qui avancent en âge -, il ne se termine pas avec le triomphe de la mort mais plutôt avec le désir de liberté. La fin a beau se rapprocher, elle n’a pas encore envahi l’homme qui médite.
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