La Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN) a organisé ce colloque intitulé Des Amériques solidaires pour le droit à l’éducation à la veille du deuxième sommet des peuples de Québec, en avril 2001. Comme le rappelle Pierre Patry, président de la FNEEQ, il s’agissait d’une « invitation à venir réfléchir sur l’avenir de l’éducation dans nos sociétés face à la mondialisation ».
Si de nombreux secteurs d’intérêt pour les citoyens sont directement concernés par le phénomène de la mondialisation, l’éducation occupe dans ce courant une position particulière qui justifie une réflexion approfondie : comme le signale Riccardo Petrella, l’école a pour « fonction d’apprendre à ‘ dire bonjour à l’autre ‘ ». Elle a donc pour rôle d’enseigner l’ouverture, sur d’autres pays, sur d’autres cultures. Elle tend donc à défendre, à promouvoir « la mondialité de notre condition commune », et non la « mondialisation » du savoir. La différence ? La « mondialisation », c’est l’uniformisation aveugle ; la « mondialité », c’est la reconnaissance de notre fonds commun et la naissance d’une solidarité mondiale. La nuance est de taille : la première est conditionnée par des diktats économiques et la seconde, par une solidarité entre les peuples. Ce n’est pas un hasard si c’est un syndicat d’enseignants qui propose cette réflexion, qui peut aussi être soumise au syndicalisme lui-même : Riccardo Petrella rappelle en effet qu’au XIXe siècle, les syndicats étaient internationalistes et qu’aujourd’hui, leur tendance « nationaliste » est encore très affirmée. Sans doute, la défense de la « mondialité de la condition humaine » passe-t’elle aussi par la « mondialisation de la lutte ».
C’est donc la vocation humaniste de l’enseignement que les États doivent défendre à tout prix, en refusant de soumettre l’éducation aux lois du marché de manière à permettre à chaque citoyen de se construire en tant que personne. La « Déclaration de solidarité » est claire sur ce point : « L’éducation n’est pas une marchandise ni un commerce, encore moins un privilège ; c’est une nécessité pour le développement de la citoyenneté et l’émancipation des personnes ».
Maurice Tardif nous rappelle que « la création de systèmes d’enseignement publics fondés sur une logique d’inclusion et de démocratisation est un phénomène très récent ». De fait, ce n’est que depuis la deuxième moitié du XXe siècle – et dans la grande majorité des pays occidentaux, à tout le moins – que l’éducation est accessible à tous. Il incombe peut-être aujourd’hui aux citoyens du monde de faire en sorte que ce droit soit octroyé aux plus démunis et d’en empêcher le recul et l’asservissement à une prétendue rentabilité.