Dans la collection « Parallèle », qui se propose d’entrer dans l’univers des grandes œuvres de la littérature québécoise, Corinne Larochelle, qui enseigne la littérature à l’UQAM, se penche sur l’œuvre de Nancy Huston, Cantique des plaines. Ce roman fut qualifié par la critique de tournant dans l’œuvre de l’auteure originaire de l’Alberta : on remarqua l’écriture foisonnante, on célébra le lyrisme moderne et surtout on acclama la réécriture de la Conquête, pleins feux mis sur la violence des Blancs qui conduisit à la spoliation territoriale des Indiens, dans une histoire qui fait converger avec l’Histoire le destin de quatre générations d’immigrants. Et cela sans être « didactique ».
Amorce d’un retour aux sources, Cantique des plaines a permis à Nancy Huston de revenir sur les lieux de son enfance, de revisiter une histoire enfouie, notamment celle de sa langue maternelle, l’anglais. Son Cantique, qui reçut en 1993 le Prix du Gouverneur général ‘ section francophone ‘, fit l’objet d’une controverse dans le monde éditorial québécois : d’abord écrit en anglais, il fut « autotraduit » ; mais c’est pourtant bien davantage une seconde version originelle qu’une simple traduction de Plain Song qu’il s’agirait de voir ici, le Cantique étant selon certains un petit chef-d’œuvre en français. Le phénomène de l’autotraduction, ou réécriture de roman écrit originellement dans une autre langue, mériterait d’ailleurs une étude approfondie.
Dans un chapitre intitulé « Bibliothèque de Nancy Huston », l’auteure fait découvrir au lecteur un macrocosme « hustonien » très comparable à l’univers beckettien, au cœur duquel sont sondés l’insignifiance de notre présence au monde et le questionnement identitaire, que l’on mesure ici dans le recours à trois langues différentes (français, anglais et algonquin).
À la propre exégèse de Corinne Larochelle s’ajoutent celles de critiques et d’anonymes cités avec une grande pertinence. Un bon moyen d’approcher l’œuvre de Nancy Huston que cette visite, parallèle au roman.