Cinquante ans après qu’il l’a lancé, le cri de révolte de l’abbé Pierre résonne encore aux portes de toutes les capitales du monde. Son écho s’amplifie et tel un songe d’une nuit d’hiver, les pauvres, les mal logés, les mal nourris, les mal dans leur cœur, les mal tout court prient pour apercevoir, qui au coin de cette rue française, qui dans tel quartier québécois, qui dans ce ghetto brésilien, un homme de foi monter aux barricades. Comme en février 1954, alors qu’un froid terrible sévissait sur Paris, et qu’un prêtre lançait sur les ondes : « Mes amis, au secours !… Vous pouvez aider les sans-logis… Grâce à vous, aucun homme, aucun enfant, ne couchera ce soir sur l’asphalte », à l’orée de ce nouveau millénaire, des voix espèrent dans le noir. Qui prendra la relève, car besoin il y a, car nécessité il y a ? Qui osera dire : « On meurt de faim à ma porte » ?
L’insurrection de la bonté s’est matérialisée en un mouvement coopératif et communautaire mondialisé : les chiffonniers d’Emmaüs. Maintenant, c’est à un jeune infirmier en psychiatrie, André Roumieux, qu’il revient de marquer un arrêt, réflexion historique certes, mais avant tout pleine de respect et de bienveillance. Fidèle des premiers temps, il a côtoyé et appris à aimer le fougueux Abbé Pierre, il a cheminé à travers cette aventure d’hommes et de femmes anonymes auxquels il donne, pour une fois, la parole.
Ainsi, ce livre n’est pas tant un éloge au prêtre adepte de la solidarité qu’un vibrant hommage à toutes celles et ceux qui ont bâti un mouvement présent dans 37 pays. C’est aussi une mise en perspective, soutenue par un message : oui c’est possible, la preuve…