Jardins-écrins entourant des résidences somptueuses, jardins de méditation où les membres des communautés religieuses venaient se recueillir, jardins publics de grandes villes – moins nombreux forcément – ou jardins-passion des résidences d’été, ces jardins méconnus nous sont restitués dans Des jardins oubliés, 1860-1960, publié par les bons soins des Publications du Québec dans sa belle collection « Aux limites de la mémoire ».
Comme les ouvrages précédents parus dans cette chronique en images du Québec d’autrefois (Aux limites de la mémoire, Entre campagne et ville, Les voies du passé 1870-1965, Les transports au Québec et Des forêts et des hommes), ce cinquième titre est enrichi d’un texte fort bien documenté, signé cette fois par Alexander Reford, président de l’Association des jardins du Québec et directeur des jardins de Métis créés par son arrière-grand-mère, Elsie.
La lecture des légendes des photos, fort instructives au demeurant, nous apprend incidemment que nous sommes ici dans la société des privilégiés de l’époque. L’image de ces grands jardins nous rappelle en effet que le Québec du XIXe siècle comptait sa part de « belle société ».
On conçoit aisément que ces édens domestiques « immortalisés pour la postérité » allaient généralement de pair avec la fortune ou le statut social. Mais on se prend à regretter que, dans ce bel ouvrage, les jardins « intimes » plus modestes, mais aussi plus personnels et plus touchants se fassent trop rares. Ils n’ont pas été pris en photo sans doute ou leurs traces se sont perdues.
Dans ces opulents jardins, nous sommes loin du décor modeste où l’on aime à camper notre histoire traditionnelle. Leur souvenir nous rappelle aussi que la passion des jardins, quoi qu’on en pense, n’est pas un engouement récent chez les Québécois.