Né à Trinidad, Neil Bissoondath est le neveu de V.S. Naipaul. Il a quitté son île pour s’établir à Toronto, puis à Montréal ; il vit maintenant à Sainte-Foy. On dit que ses romans appartiennent à la world fiction, un genre littéraire auquel sont associés Michael Ondaatje et Paul Auster. Neil Bissoondath travaille à une œuvre qui ouvre sur le monde et s’interroge sur l’identité, aussi bien politique qu’individuellle. Ce questionnement lui fera publier Le marché aux illusions (Boréal et Liber, 1995), essai controversé sur le multiculturalisme qui l’a propulsé sur les scènes médiatiques politiques. Avec Tous ces mondes en elle , Neil Bissoondath nous rappelle ce qu’il est d’abord et avant tout : un écrivain. J’ajoute : majeur.
Deux femmes, les deux voix du roman, sont en quête de (ou font enquête sur) leur histoire. Yasmin, présentatrice de nouvelles à la télé, atterrit sur une île des Antilles, au pays de sa mère, pour y répandre les cendres de cette dernière. Elle laisse derrière elle une vie de couple agonisante, des souvenirs de famille douloureux. Sur l’île, elle découvre un oncle et une tante qui lui sont étrangers ; ils lui révéleront tout de même des événements déterminants à propos de ses origines. Shakti, elle, retrace les grandes lignes de son histoire en compagnie de Mrs Livingston, interlocutrice muette qui finira par stagner dans le coma. Bien que mariée à un homme politique, Shakti aura été tenue bien loin du pouvoir. On comprend toutefois que cette distance a affiné son point de vue sur le fonctionnement du monde. Sa lucidité, sa voix sont magnifiques.
Neil Bissoondath écrit : « L’éducation, surtout au sens large, nous apprend à poser des questions. Et les questions confirment notre existence. » Son roman nous remplit l’esprit et son écriture, d’une sensibilité remarquable, nous fait sentir vivant. À ranger parmi les incontournables.