Quel bel éloge, un peu tardif néanmoins, mais mieux vaut tard…, rendu au petit-fils du marquis de La Pailleterie et d’une esclave noire de Saint-Domingue.
Dominique Fernandez prend le parti de la gourmandise des mots gais, du goût païen et des histoires ludiques, états d’être des plus suspects à notre époque, qui veut que la littérature soit une chose sérieuse et intellectuelle.
Réhabiliter un Alexandre Dumas père de 91 pièces de théâtre et d’une centaine de romans, d’une logorrhée de Mémoires et autres impressions de voyage. Reconnaître, en ce mulâtre exposé par la couleur de sa peau et la frisure de ses cheveux aux railleries forcément bien pensantes du Paris des années 1825, un écrivain à l’égal de Balzac et Hugo, ses contemporains illustres. Admettre l’existence d’une cinquantaine de collaborateurs habituels ou occasionnels, consommés à toutes fins utiles. Accepter l’hypothèse du plagiat qui faisait prendre à ce quarteron son bien là où il le trouvait sans que sa crédibilité en soit sérieusement amoindrie. Dominique Fernandez, en passionné, réussit ça et même davantage.
Le Dumas de nos premiers émois littéraires ressurgit aux détours d’une citation où les victimes prennent leur revanche sur les oppresseurs, aux détours d’une folle expédition aux pays des aventures où 37 267 acteurs bien comptés sont mis en scène.
Cet essai littéraire à bâtons rompus est organisé sous l’égide des muses, à qui Dominique Fernandez a confié le subtil dosage entre imagination et observation, que prône d’ailleurs le grand écrivain du siècle dernier. Son génie consistait à distribuer équitablement et correctement des faits réinventés, juste ce qu’il fallait pour leur donner une nouvelle réalité et offrir au public un territoire de liberté… et de chevauchée.
Ah ! Dumas nous est conté…