À l’instigation d’Amel Zaazaa et de Christian Nadeau, une dizaine de personnes se sont liguées pour en appeler à une lutte systémique contre le racisme au Québec.
Leurs onze brefs essais trouvent leur motivation dans une volonté partagée d’identifier les multiples incarnations d’un racisme que trois événements marquants, au cours des dernières années, ont rendu particulièrement visible : la mort de Fredy Villanueva sous les balles d’un agent de la paix de Montréal-Nord ; les allégations de violences physiques subies par des femmes autochtones aux mains de policiers ; la tuerie de la grande mosquée de Québec.
Ces incidents déplorables pointent de façon claire les principales cibles du racisme québécois : Latino-Québécois, Autochtones et musulmans. Sans la communauté noire, ce portrait de famille resterait toutefois incomplet. Le terme de « race », peut-on ainsi observer avec Cheikh Tidiane Ndiaye, s’applique désormais à des catégories d’appartenance autres, telles que la culture ou l’identité, l’ethnie ou la religion.
Parmi le florilège de textes, les plus intéressants sont ceux qui témoignent d’une résistance de terrain. En mettant en relief les conséquences du racisme systémique dans Montréal-Nord, Amel Zaazaa signe l’une des contributions phares du collectif. Fracture numérique, déserts alimentaires, accès limité aux transports en commun, soins de santé déficients sont au nombre des effets que le mouvement citoyen Hoodstock s’attache à renverser. Inspirant l’implication citoyenne, la philosophie du regroupement se traduit par le slogan « rien pour nous sans nous ». La création de la librairie Racines, la mise en place d’ateliers de proximité et l’implantation d’une maison du numérique sont autant de victoires concrètes remportées contre le racisme.
Sur le plan des représentations historiques, l’artiste hip-hop Webster rappelle, dans un autre texte, l’importance d’édifier une mémoire rassembleuse. Des centaines de femmes et d’hommes noirs, à l’instar de l’esclave Olivier Le Jeune, ont contribué contre leur gré à bâtir la Nouvelle-France. Pour plusieurs, l’identité québécoise traduit pourtant un sentiment d’appartenance exclusif aux descendants canadiens-français. Miser sur ce fonds commun et sur son enseignement dessinerait sans contredit une communauté d’intérêts plus inclusive. Il faudrait pour cela accepter de sortir de l’ombre une version beaucoup plus noire de notre histoire.