Quand on m’a demandé d’écrire un texte sur le livre jamais lu, j’ai bien pris le temps d’y penser. Rien d’étonnant, n’est-ce pas ? La réflexion fut toutefois brève. Le comte de Monte-Cristo m’est venu rapidement à l’esprit. Non, je ne l’ai jamais lu. Pourtant, Dieu sait que je suis une dévoreuse de livres. Depuis des années, ce chef-d’œuvre d’Alexandre Dumas trône dans notre bibliothèque, juste à côté de La reine Margot, me regardant passer et repasser sans m’arrêter. Ce n’est qu’en visionnant la dernière adaptation télévisuelle avec l’excellent Gérard Depardieu que je me suis enfin décidée à lire ce livre, il y a quelques mois déjà. Je me vois encore caressant la couverture longuement, avec ce désir profond de me plonger dans l’histoire. J’étais justement plongée dans mon bain lorsque je l’ai commencé.
Mais les mois ont passé et je n’ai lu qu’une centaine de pages. Cette lecture était pourtant un vrai délice, ce qui ne m’a tout de même pas empêché de ranger à nouveau ce livre dans notre bibliothèque, me laissant disponible à d’autres lectures.
Cela dit, tandis que je rédige ces lignes, je prends conscience que ce n’est plus de ce livre dont j’ai vraiment envie de parler. En fait, mon choix définitif ne porte pas sur un mais plusieurs livres d’un même auteur un auteur que je n’avais jamais lu et qui, au fil des années, aurait dû m’attirer comme un aimant. Il s’agit ni plus ni moins de la légendaire Agatha Christie ! Oui, je l’avoue. Ce n’est que tout récemment que je suis tombée en amour avec ses écrits, au point d’en lire sept à la suite en l’espace de quelques semaines. Le premier de la série est celui dont j’avais le plus entendu parlé, à savoir Les dix petits nègres. En prenant connaissance de mes aveux, certains pourraient chuchoter ou s’écrier : « Oh ! quelle honte ! » Mais il faut admettre que tous les livres demandent à être lus un jour, que ce soit hier, aujourd’hui ou demain, n’est-ce pas ?
Les dix petits nègres m’intriguait depuis longtemps déjà. Lorsque j’étais jeune, je voulais devenir inspecteur de police. Peut-être est-ce la raison qui m’a souvent poussée à lire des romans policiers ? Or Agatha Christie fait aussi partie de ma jeunesse. Ses écrits m’ont toujours accompagnée mais je ne m’y suis jamais arrêtée. Pourquoi ? Je m’interroge encore sans trouver de réponse satisfaisante. Oh ! je pourrais évoquer mille et une excuses, mais à quoi bon. Même lorsque je me suis procurée l’un des ses livres, je n’ai pas réussi à me lancer dans sa lecture. Il faut dire que j’ai la mauvaise habitude de ne pas lire un bouquin sans posséder toute la collection ou tous les tomes du même auteur. Un motif un peu scabreux tout de même (vous ne me voyez pas mais j’en souris !).
Au fil des ans, plusieurs volumes d’Agatha Christie ont pris place ainsi dans notre bibliothèque en la décorant de leur parure bleue et dorée. Il a fallu que je me retrouve aux soins intensifs peu avant les fêtes de Noël 2003 pour que j’aie, dès mon retour à la maison, saine et sauve, une fringale de lecture comme j’en ai eu rarement l’occasion depuis la naissance de nos trois enfants. De toute façon, je devais impérativement me reposer, alors autant joindre l’utile à l’agréable, comme on le dit si bien !
Ainsi, un après-midi, mon regard fut irrémédiablement attiré par la tranche bleue et dorée qu’arborait l’une des longues étagères. Je me souviens encore de m’être levée du divan et d’avoir cherché fébrilement en longeant la rangée du bout des doigts jusqu’aux Dix petits nègres. Avec joie, je le découvrais et le sortais. Tout comme pour Le Comte de Monte-Cristo, j’en caressai la couverture avant de m’étendre de nouveau sur le divan, bien au chaud sous la couette. Dès la première page, je n’ai plus voulu me séparer de cette lecture. Et, au moment où vous lirez ces lignes, je serai probablement plongée dans un autre livre d’Agatha Christie à moins d’avoir fait un arrêt obligatoire sur Le Comte de Monte-Cristo…
Je suis convaincue que je n’aurai aucune difficulté à digérer ces nombreux livres et que de nouveaux titres se mettront rapidement dans ma liste du ou des livres jamais lu(s). Déjà, quand je regarde nos bibliothèques qui sont pourtant considérables, je me dis que j’aimerais avoir tout lu. Mais que voulez-vous ? J’ai, comme on dit, les yeux plus gros que la panse ! Et je ne parle pas de mon appétit insatiable lorsque je me retrouve dans les librairies aux étalages toujours aussi attirants ou dans les bibliothèques aux rayonnages multiples.
Vive les livres ! Vive le bonheur de pouvoir les lire et de se faire plaisir en se disant, un jour, je lirai celui-ci en particulier. À mon avis, il y a toujours un livre en tête de nos listes personnelles, jusqu’à ce qu’un autre, tout aussi pimpant et attirant, prenne sa place à son tour.