Pierre Grimal, ancien professeur de littérature latine à la Sorbonne bien connu pour ses études historiques et archéologiques sur Rome, compte parmi les chercheurs les plus productifs du XXe siècle. Ses travaux sur la Ville éternelle lui ont valu reconnaissance et prix (il a notamment reçu en 1993 le titre honorifique de citoyen de Rome). Dans Voyage à Rome, ouvrage composé de textes parus antérieurement ainsi que d’inédits, Pierre Grimal, bien qu’il ne laisse nullement de côté le pan scientifique, s’autorise un rapport plus personnel à la capitale italienne. D’entrée de jeu, il révèle ses intentions, intimes à souhait : « Nous voudrions, dans les pages qui suivent, reprendre de très anciennes rêveries, et les poursuivre un peu plus avant, non plus ‘visiter’ Rome et la découvrir, mais la ‘revisiter’ ». Ces rêveries prennent tantôt le ton de la confidence, tantôt celui de la leçon ; anecdotes, expériences personnelles et descriptions exhaustives s’y succèdent au rythme des explorations du chercheur.
C’est en réalité à un voyage et temporel et spatial que le lecteur est convié ici. Certes, l’historien en Pierre Grimal s’intéresse à la Rome ancienne, mais l’aventurier en lui, curieux et hardi, ne se lasse pas de parcourir la Rome contemporaine, de sorte que le constant mouvement de va-et-vient entre passé et présent permet de convoquer une image vivante et plurivoque de la ville. Les points de vue adoptés par l’auteur sont d’ailleurs multiples et traduisent l’implication de l’historien, de l’anthropologue, de l’architecte, de l’archéologue, voire de l’urbaniste : Grimal explore toutes les avenues possibles pour rendre les merveilles de Rome – arts, littérature et mythologie n’étant point oubliés. Si cette plongée dans la Ville éternelle provoque par moments un sentiment de désillusion (« Rome est décevante [ ] parce qu’elle n’a jamais cessé d’exister et de vivre. [ L]’on devine que, partout, les immeubles d’aujourd’hui ou d’hier reposent sur des amas d’histoire et s’appuient sur des monuments antiques que leurs fondations ont à jamais mutilés », avoue Grimal), la passion n’en finit pas moins par prendre le dessus et l’amoureux de la cité devient au cours de son voyage un Romain dans l’âme.