Lors du conflit de 1939-1945, les volontaires québécois sont-ils aussi nombreux que ceux du Canada anglais ? La question, tendancieuse et réductrice, ne rend pas justice au livre. À la lecture, en effet, on constate que l’auteur voit plus loin que les chiffres. Un autre constat s’ajoute, moins réjouissant. Si les questions posées méritent l’attention, la méthodologie utilisée fragilise les réponses. Surgit alors une tentation à laquelle l’auteur résiste mal, celle de substituer son interprétation à celle des témoins.
Quoi qu’en dise l’auteur, l’échantillon déconcerte. Dix-neuf vétérans le composent, dont seulement huit qu’on pourrait qualifier sans mépris d’exécutants. Trois sont des sous-officiers et huit sont officiers à la fin du conflit. Les délais étonnent eux aussi. La guerre se termine en 1945, les entrevues sont menées en 1995 et on attendra 2005 avant que l’analyste se penche sur les entrevues conduites par quelqu’un d’autre. Point n’est besoin d’être docteur ès communications pour redouter la distorsion ni d’être gérontologue pour accueillir prudemment des impressions ressassées pendant un demi-siècle et cent fois exposées aux réactions des proches.
Les conclusions de l’auteur laissent songeur. Peut-être le Québec détestait-il la conscription plus encore que la guerre. Peut-être les Québécois jugeaient-ils correctement l’unilinguisme de l’armée.