Un roman qui laisse des traces puisqu’on y repense bien après la fin de la lecture. Située aux antipodes de la rectitude politique, cette histoire dure, cruelle et sans complaisance aborde de front la question de la pédophilie homosexuelle du point de vue de l’abuseur. Grâce au « je » du narrateur qui nous fait mal tant il vibre de vraisemblance, on vit le drame de l’enfant victime devenu adulte prédateur.
Par son personnage fictif de Pierre Tremblay, Bernard Lavoie nous conduit dans l’univers mental du pédophile avec ses regrets mêlés de faux remords, ses envies de recommencer, ses pulsions incontrôlables. L’originalité de ce roman tient non seulement aux gifles magistrales qu’il administre à la rectitude politique, mais aussi aux justifications troublantes que se donne l’abuseur. Le roman nous pose un problème moral car on assiste à une sordide histoire de pédophilie tout en éprouvant l’envie d’accorder des circonstances atténuantes à l’abuseur.
Le lecteur détestera Pierre Tremblay. Il lui souhaitera tout le mal possible, mais en même temps, il sera amené à comprendre qu’avec un passé comme le sien, l’abuseur était peut-être condamné à devenir prédateur. Cette perspective désarçonne puisqu’elle remet en question l’approche strictement répressive ou policière de la pédophilie.
Vie et mort d’un pédophile envisage aussi crûment la question du Mal. Une enfance abominable expliquerait-elle la monstruosité de certaines personnes ? La justifierait-elle ? La question demeure ouverte et elle harcellera le lecteur qui ne pourra que s’interroger sur le degré réel de culpabilité de l’abuseur.