La traduction de la littérature québécoise influence directement sa diffusion, l’intérêt qu’elle suscite à l’étranger et les possibilités de lectures critiques dont elle peut être l’objet.
Cela est, certes, un objet de réjouissance pour ses partisans. La traduction permet à nos œuvres d’être lues aux quatre coins du monde et, en retour, nous permet de lire les œuvres rédigées en langues étrangères. Comment, en effet, connaître l’Autre si on ne peut le lire dans sa langue ? Pourrait-on, de plus, grâce à l’augmentation du nombre de textes littéraires traduits, voir se dégager une surprenante « convergence de l’imaginaire » entre le Québec et le Mexique, par exemple ? Aussi faut-il se demander : « Qui traduit-on ? Pour qui traduit-on ? Comment traduit-on ? Dans quel but traduit-on ? »
Traduction et enjeux identitaires dans le contexte des Amériques, publié sous la direction de Louis Jolicœur aux Presses de l’Université Laval en 2007, est un essai des plus captivants. Discours sur la diversité culturelle, en particulier sur le continent américain, ce livre est de la lignée de nombreux essais qui, depuis plus de vingt ans, dessinent les pourtours d’une nouvelle réalité de la littérature québécoise. On comprend mieux, depuis Sociocritique de la traduction (Anne Brisset, 1990), par exemple, les enjeux de la traduction et de la relecture dont elle est capable. Le choix des ouvrages à traduire et la manière dont ils seront traduits tiennent malheureusement trop souvent d’un ethnocentrisme qui « a sans doute connu ses plus grandes heures de gloire dans la France des XIXe et XXe siècles, où l’on traduisait non pas tant pour s’ouvrir à l’autre que pour mieux le phagocyter ».
L’ouvrage de Jolicœur est constitué d’articles rédigés par des traducteurs, traductologues, linguistes et autres spécialistes d’origines diverses qui jettent un regard neuf sur ce qui est effectivement traduit dans le corpus québécois, mais aussi sur ce qui est traduit pour nous. Il est intéressant (mais bien peu surprenant) d’apprendre que la production littéraire européenne est constituée « bon an mal an de 20 à 40 % de traductions » alors que « seulement 3 % des titres publiés [en 2006] aux États-Unis étaient des traductions ».