Avis aux lecteurs lambda. Si vous étiez tenté de vous plonger dans les considérations de l’auteure sur la lecture ou l’écriture telles qu’elle les a exprimées dans son dernier opus, sachez que vous vous engagerez dans un ouvrage d’un intérêt inégal.
Dans un discours méandreux, peu structuré et peu étayé, Alice Zeniter dans L’art de perdre (Goncourt des lycéens 2017) aborde à la fois la question de la représentation des femmes dans la littérature occidentale et les rapports qu’elle-même entretient avec les personnages romanesques, aussi bien les siens que ceux de ses confrères et consœurs de plume.
Concernant la représentation des femmes, Zeniter nous dit qu’elle est faussée et forcément incomplète puisque la littérature occidentale est, depuis des siècles, majoritairement écrite par des hommes. Et même quand les femmes prennent la plume, nous dit encore l’auteure, celles-ci se coulent le plus souvent dans le moule préalablement élaboré par la vision masculine ou alors elles sont jugées à cette aune.
C’est la partie la plus intéressante de l’ouvrage, grâce aux détails qu’elle nous révèle sur le modus operandi du milieu littéraire en France. On y apprend, entre autres choses, que même aujourd’hui les hommes et les femmes sont loin d’être traités également par les éditeurs, qu’un machisme assez vulgaire y règne à tous les niveaux et qu’il est difficile pour une femme de s’y faire une place.
Pour ce qui est du rapport du lecteur ou de l’auteur avec les personnages – qui peut aller de l’admiration à l’identification fusionnelle –, elle nous dira que, pour elle, le piège à éviter est celui de l’autofiction. Le « Madame Bovary, c’est moi », que n’aurait pas écrit Flaubert, très peu pour elle. Elle parle également, et assez longuement, de la disparition du personnage telle que la prônaient les tenants du nouveau roman, Alain Robbe-Grillet et Nathalie Sarraute, entre autres, dans les années 1960. Le traitement de ce thème est à l’image de celui-ci : un peu abscons et de peu d’intérêt pour le lecteur moyen.
En partie essai fourre-tout, en partie mémoires parcellaires d’une grande lectrice, Toute une partie du monde a été rédigé pendant le confinement imposé à la France, en 2020, pour cause de pandémie de COVID-19. C’est sans doute ce qui explique la forme un peu lâche de ce texte écrit sans autre nécessité, semble-t‑il, que d’occuper « intelligemment » le temps de l’auteure.