On relit avec plaisir les premiers romans de Gabrielle Sidonie Colette (1873-1954), « Colette » étant le nom de famille du père de la romancière. Ce volumineux coffret regroupe en un seul tome une douzaine de romans tirés d’un vaste répertoire, auxquels on a ajouté une nouvelle, « Gigi ». L’ensemble n’inclut pas le délicieux cycle de Claudine, mais on y retrouve des classiques du roman féminin comme La vagabonde, Chéri, Le blé en herbe, La seconde, La chatte, et Mitsou ou comment l’esprit vient aux filles.
Les romans de cette véritable théoricienne de l’amour naissant et du drame sentimental ont très souvent pour personnage principal de jeunes femmes belles et déterminées, quelquefois candides, convoitées par des hommes représentés comme d’énormes spermatozoïdes. Les situations sont souvent proches de l’actualité parisienne et des mSurs de l’époque. L’écriture est fluide et spontanée, agrémentée à l’occasion de mots recherchés.
Dans cette édition, chaque roman est précédé d’une présentation stylistique et historique de Francine Dugast, spécialiste de l’œuvre de Colette. Celle-ci rappelle à quel point ces récits, jugés proches de la paralittérature, demeurent des exemples remarquables de ce que la littérature populaire a fait de mieux au siècle dernier. Le style – pourrait-on dire « charnel » ? – de Colette avait même suscité l’admiration d’André Gide et de François Mauriac. Il suffit de relire les derniers chapitres de Mitsou, où l’on passe de la narration conventionnelle à la correspondance suivie entre les amants avec – audace suprême ! – quelques fautes d’orthographe volontairement laissées dans le texte rédigé par Mitsou, comme pour marquer le manque d’éducation chez le personnage de la jeune femme. De même, dans La vagabonde, la narratrice relit ses lettres, retranscrites intégralement et insérées dans le récit.
Cette nouvelle réédition des œuvres de Colette permettra une agréable (re)découverte d’une romancière attachante et prolifique, au style unique, à une époque où le roman français était à son apogée.