La promenade commence en 1715, au lendemain de la mort de Louis XIV, et se termine après l’exécution de Louis XVI, en l’« An de ténèbres » 1793. L’historien Jean Haechler, auteur de nombreux ouvrages dont certains, plus récents, portent sur le dix-huitième siècle, puise chez les mémorialistes de l’époque la matière du journal fictif qu’il attribue à un père et à son fils qui prend le relais après sa mort, les comtes Hyacinthe et Benoît du Faur. Le premier, ami de Montesquieu, et le second, de Beaumarchais, s’indignent des privilèges dont jouit la noblesse, au détriment de l’équité et de la prospérité du royaume. S’agissant du peuple, les exemples de peines d’une extrême sévérité ne manquent pas alors que la plus grande complaisance jette un voile sur les délits de la noblesse et du haut clergé tributaires du pouvoir royal. En effet, les évêques tout comme les nobles obtiennent du roi leurs charges, honorifiques le plus souvent, et les généreux émoluments qui les accompagnent, à la suite de tractations et de jeux d’influence. Luxe, lubricité et abus de pouvoir les caractérisent. Tout nobles qu’ils soient eux-mêmes, les auteurs fictifs vont jusqu’à critiquer le roi, qu’il s’agisse de Louis XV, que le père soupçonne d’être plus intéressé à chasser qu’à conduire le royaume, ou de Louis XVI, que le fils qualifie de « Louis l’Inconséquent, Louis le Faible, Louis l’Inerte ». Quoique particulièrement préoccupés par la justice, les comtes du Faur ne se privent pas de rapporter des ragots, de décrire les excentricités des courtisans et courtisanes et d’ironiser à propos des aventures galantes qui ruinent les messieurs quand elles ne les font pas cocus, histoires des plus répandues en ce siècle de libertinage. Spirituels comme les y incitent leur classe et leur siècle, ils s’intéressent également au facéties qui défraient la rumeur, du moins jusqu’aux années d’incertitude, puis de malheur qui ont suivi la prise de la Bastille, alors que les événements tragiques se précipitent. La promenade conduite par Jean Haechler et ses deux narrateurs a de quoi instruire tout en amusant, par l’illustration des usages et des faits de civilisation dans lesquels s’enracine la grande Histoire, celle que retiennent les manuels.
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