Décédée à New York le 23 décembre 2021, à 87 ans, l’écrivaine native de Sacramento avait consacré à la question du deuil deux essais lumineux.
L’année de la pensée magique (2005, prix Médicis 2007), inspiré par la mort en 2003 de son époux, l’écrivain John Gregory Dunne, et Le bleu de la nuit (2011), rédigé après la disparition, à peine deux ans plus tard, de leur fille Quintana Roo. « Elle écrit comme si elle faisait un reportage sur le deuil », observe Chantal Thomas dans sa préface. « Et elle en connaît énormément sur le sujet. »
Le deuil est désormais tourné vers elle (aux États-Unis, la romancière et journaliste a le statut d’icône). Pour tout vous dire propose une sorte de condensé du style de Didion. Le propos y est resserré (elle n’emploie aucun mot superflu), une grande attention est accordée aux détails significatifs et, à la différence d’un Norman Mailer ou d’un Hunter S. Thompson, eux aussi issus du nouveau journalisme des années 1960, la subjectivité de l’auteure ne se fait jamais envahissante. L’ouvrage rassemble douze chroniques qui paraissent pour la première fois en français. Les six premières ont d’abord paru dans le Saturday Evening Post en 1968. Les six suivantes ont été publiées dans différents livres ou magazines entre 1976 et 2000. Du programme des Joueurs Anonymes à des photographies de femmes célèbres, d’une visite à Hearst Castle – le château que s’était fait construire à San Simeon le magnat de la presse William Randolph Hearst – à une rencontre avec Nancy Reagan à l’époque où son mari était gouverneur de Californie, ces textes abordent toutes sortes de sujets, avec une appréciable liberté de ton et un heureux sens de la formule. Les meilleurs traitent d’un aspect ou l’autre de l’écriture (« Pourquoi j’écris », « Raconter des histoires »). L’auteure s’y montre marquée par sa lecture de Hemingway. Pour tout vous dire permet d’apprécier à la fois la sincérité de Didion (la presse underground lui avait révélé l’importance de s’adresser directement au lecteur, de lui parler comme à un ami) et sa clairvoyance, comme dans son analyse du phénomène Martha Stewart, quelques années avant les démêlés de cette dernière avec la justice américaine.