L’une vit en ville et parfois au bord de la mer, l’autre en banlieue, près d’une rivière. Issues de milieux fort différents, l’une était une enfant solitaire devenue rat de bibliothèque, l’autre a grandi sous les projecteurs médiatiques. Tout aurait pu les séparer, mais leurs échanges épistolaires semblent les réunir.Les écrivaines Dominique Fortier et Rafaële Germain ont à peu près le même âge et toutes deux sont mères de petites filles, Zaza et Zoé. Là s’arrêtent les ressemblances. Si elles ne se fréquentaient pas avant d’écrire ensemble Pour mémoire, leur œuvre à quatre mains, elles sont depuis devenues amies, paraît-il. Animées du même désir de réflexion et de communication, elles ont peu à peu construit un « répertoire de miracles fragiles et minuscules [qu’elles ont] choisi de garder comme on conserve les fleurs entre les pages d’un livre », expliquent-elles en introduction.Tout en douceur, parfois en rigolade ou alors sur un ton plus sérieux, elles ont pris le temps de regarder la vie battre autour d’elles pendant six mois, d’avril à septembre 2017, et tous les jours, chacune a partagé ses observations avec l’autre. Nature en éveil, mots d’enfants ou réflexion politique, vacances en famille ou catastrophe naturelle, elles ont ainsi confectionné au fil du temps un florilège parfois étonnant, toujours attachant.Il n’y avait pas vraiment de règles établies, pourrait-on penser, le projet étant celui d’écrire, de correspondre, de se confier. Les autrices apprennent à se connaître. Dominique Fortier avoue aimer « la mer, ma fille, les livres, les oiseaux, les arbres », ce à quoi rétorque Rafaële Germain, « ma fille, le silence, la rivière et ses berges, d’innombrables saveurs, le corps de mon mari, les pages d’un livre ».Toutes deux savent regarder, toutes deux savent transmettre l’émotion. L’écrivaine et scénariste Rafaële Germain raconte, entre autres choses, sa vie en zone inondée : « Nous voguons tranquillement dans les rues […] On serait malvenus de l’admettre, mais Dieu que c’est beau ». Dominique Fortier, lauréate du Prix littéraire du Gouverneur général pour Au péril de la mer, déclare quant à elle : « Pour un peu, j’aurais l’impression que c’est la lumière qui écrit, je ne fais que transcrire avec une seconde de retard ».La beauté de l’objet Pour mémoire – comme sait si bien en produire la maison d’édition Alto – magnifie le plaisir de la lecture, beauté que rehaussent les reproductions des broderies d’Éliane Ste-Marie, de l’Atelier de l’Épinoche. Au printemps 2020, on ne peut s’empêcher de penser à ce que Fortier et Germain auraient écrit en ces temps de pandémie, en ces temps de confinement. Une certitude, l’œuvre aurait été de qualité.
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