À Minierville, municipalité nordique jouxtant une réserve autochtone, Stéphanie se réfugie dans le chalet de ses parents afin de faire le point sur sa relation de couple. Parce que Josée, sa conjointe des dix dernières années, désire maintenant fonder une famille. Or, cela impliquerait bien entendu pour son amoureuse de sortir du placard, de révéler à sa mère, une femme bavarde à l’esprit étroit, son orientation sexuelle et de devoir aussi faire face aux réactions de ses collègues professeurs.
Être ou ne pas être soi-même devant le regard des autres, voilà le dilemme que pose ce récit fort bien huilé de Marie-Christine Bernard, où les questions d’identité sont placées sous l’hybridité symbolique du polatouche, petit écureuil volant, à la fois belette et chauve-souris, comme le remarque Stéphanie, n’étant pourtant ni l’une ni l’autre. Ce problème prend en effet une forme différente pour Claude, victime tardive du « Sixties Scoop » et confident de longue date de celle qu’il surnomme amicalement Sté, quand il accourt auprès d’elle pour partager la douceur réconfortante d’un Chianti.
Son rapport au monde cri, l’homme le vit uniquement à travers les livres qu’il dévore sur le sujet, une solution de rechange utile qui lui permet en même temps de se tenir à distance de la réserve et de la culture autochtone de tous les jours. Josée, de son côté, a beau assumer pleinement son homosexualité, elle aussi refoule ses racines, préférant nier ou taire son passé et sa famille cris que d’y être associée. Mais chaque jour ou presque à l’hôpital où elle occupe un poste d’infirmière, des patients de la réserve lui rappellent d’où elle vient.
Ces trois personnages crédibles donnent corps à un roman accrocheur dans lequel s’entremêlent des quêtes d’affirmation personnelle, sexuelle ou culturelle. L’approche psychologique est fouillée, les dialogues sont réalistes. On regrette en revanche que l’auteure de Polatouches n’ait pas laissé plus de place à l’interprétation du lecteur, notamment en ce qui concerne cette idée d’associer la figure du Wendigo à de petits trafiquants de drogue pour servir l’intrigue secondaire. Or, dans ce cas précis, les explications arrivent trop tôt, de sorte que l’on se détourne du déroulement des événements qui s’ensuivent. Puis la fin, sirupeuse à souhait, déçoit par son dénouement convenu qui succombe à la facilité du happy end.
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