Hélène Marin est étudiante à la maîtrise en psychologie. Elle habite Montréal, occupe son été à lire Jacques Lacan et poursuit la rédaction d’un mémoire portant sur le désir. Sympathique névrosée, pendant féminin du Woody Allen des belles années, elle a maille à partir avec la gent masculine, surtout avec le séduisant Philippe H., dont elle croise le champ magnétique au hasard d’un taxi partagé. Commence alors le jeu du chat et de la souris. Les tergiversations s’étirent et conduisent les tourtereaux, qui se repoussent comme deux pôles positifs, jusqu’aux confins des monts Chic-Chocs.
Philippe H. ou la malencontre est le récit de cette fuite en avant, orchestrée par la langue rythmée, vive et inventive de Mylène Fortin. Accompagnée de sa sœur Élise et de Philippe H., qui s’ajoute in extremis à l’équipage, Hélène fait un saut au pays de ses origines afin de se réapproprier sa féminité. La symbolique de la mer est partie prenante de cette prise de conscience, étant la materia primordiale à laquelle renvoie explicitement le patronyme de l’héroïne. En route, des souvenirs remontent à la surface, éclairent sa nature éparpillée et angoissée, ainsi que sa peur panique de Philippe H., sorte d’archétype masculin, d’homme avec un grand H. Resurgit le souvenir de Léon Jerome, par exemple, son petit frère adoptif d’ascendance micmaque, qu’elle croyait mort et enterré. Cette rencontre lui permet d’identifier la source de son conflit intérieur et de laisser par la suite libre cours à ce désir passionnel qui lui triture l’âme.
Une résolution qui arrive à point nommé, car malgré la douce folie d’Hélène et de sa famille joyeusement dysfonctionnelle qu’irradie chaque phrase de Mylène Fortin, la question des méandres amoureux passe près de terminer l’escapade sur les rotules. Hélène a beau être une intellectuelle dans la vingtaine, l’universitaire rationnelle s’éclipse quelquefois au profit de la midinette fleur bleue qui vit sa passion comme une chanson de Roch Voisine. Les passages descriptifs où Philippe H. sent le fenouil, l’herbe coupée, la rosée, le lys, où Hélène se sent le ventre et la poitrine envahis d’une agréable chaleur auraient pu finir par agacer. La jeune écrivaine a cependant le sens de l’intrigue et scelle l’aventure avant qu’elle ne tombe en panne. Philippe H. ou la malencontre est un bon premier roman, indubitablement sensuel et sensoriel, qui n’évite pas toujours les écueils du sentimentalisme.
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