Qui ne connaît pas la Sagouine ? Cette pauvre et vieille femme de ménage lave les planchers des théâtres depuis 1971. Et tout en frottant partage avec l’un de ses proches ce qu’elle a vécu et pense de la vie.
Ou encore, elle épluche ses patates, range le bois, se berce. Des gestes simples qui illustrent une vie tout aussi simple, si ce n’était la qualité extraordinaire du verbe qui l’anime. Une philosophe en vêtement de travail. Depuis sa création, cette pièce « pour femme seule » écrite par Antonine Maillet est interprétée de magnifique façon par Viola Léger.
Née le 29 juin 1930, Viola Léger a 41 ans quand elle prend « possession » du personnage – ou est-ce l’inverse ? « Jouer à la Sagouine ne marcherait pas. On doit la devenir, l’incarner, autrement on n’y croit pas », affirme-t-elle dans La petite histoire de la Sagouine, où elle raconte les premières années (de 1971 à 1976) de sa vie avec ce personnage plus grand qu’elle. Un personnage qu’elle habite avec amour, passion et respect : « À mesure que je souligne mes rides et que mes épaules se courbent sous le poids du corps de la Sagouine, je me sens allégée de l’intérieur. Oui, je l’aime, cette Sagouine, elle est à moi ». Et toute l’Acadie répond « c’est vrai », tant est forte l’osmose entre le personnage et son interprète.
Elle portera le personnage jusqu’à ce qu’un accident vasculaire cérébral la contraigne à l’abandonner en janvier 2017, après, dit-on, plus de 3 000 représentations, dont de nombreuses au Pays de la Sagouine, ce « village » qui rend hommage au monde d’Antonine Maillet et qui fait les délices aussi bien des Acadiens que des touristes qui le fréquentent l’été depuis 1992.
Le livre est un recueil d’anecdotes de tournées que Viola Léger a dictées à une « secrétaire professionnelle », précise le mot de l’éditeur, ce qui explique l’oralité du texte. Un texte sans prétention, résolument orienté vers les « bons souvenirs » : « Puisque je ne collectionne pas les cailloux qui font mal aux pieds, je ne partagerai pas les moments difficiles. Ce que je veux vous raconter, ce sont mes trésors ». Et des trésors, elle en conte beaucoup, rappelant les représentations qui l’ont marquée par la chaleur des gens, ou par des circonstances plus ou moins stressantes qui se terminent bien (tout fonctionne bien dans ses évocations, ce qui atténue la portée du livre). Seize pages de photos complètent l’ouvrage.
Si le livre se lit d’un trait, on ne peut que regretter que Viola Léger limite son propos aux premières années de sa carrière d’interprète de la Sagouine et qu’elle n’aborde pas sa propre vie, elle qui a pourtant eu une influence importante sur la société acadienne et pas seulement à cause de la Sagouine.
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