La curieuse fascination pour la laideur qui caractérisait les toiles d’Otto Dix (1891-1969) se retrouve aussi dans ses dessins, aquarelles et fusains. Peintre avant-gardiste et polyvalent, proche des grands mouvements artistiques des années 1920 (dadaïsme, expressionnisme, nouvelle objectivité) Otto Dix représente pourtant ce que l’art allemand a fait de plus original depuis un siècle. Détesté par ailleurs par les nazis qui trouvaient son style « dégénéré » et grotesque, son nom disparaît de l’art officiel lors de l’arrivée d’Hitler et, à partir de 1937, 260 de ses toiles sont retirées des musées allemands, dont plusieurs demeurent aujourd’hui introuvables.
Le catalogue soigné, complément de l’exposition présentée à Beaubourg l’hiver dernier, regroupe une centaine de dessins. Trois articles précis analysent les œuvres reproduites. La présentation de Christian Derouet fournit les balises biographiques qui permettent de suivre les années préparatoires. Le texte de Rainer Rochlitz situe l’évolution, les influences et le style de l’artiste, surtout connu pour ses toiles expressionnistes. Le chapitre d’Ulrike Lorenz sur « Otto Dix dessinateur » contient beaucoup d’éléments stimulants, de témoignages et de citations mais hélas ! aucune référence quant aux sources.
Les reproductions occupent la moitié de l’ouvrage. Le coup de crayon précis et vigoureux d’Otto Dix se révèlent dans les représentations de paysages, dans les nombreux autoportraits dessinés sans complaisance et dans des études saisissantes : soldats, tranchées ; nus de femmes enceintes ou obèses ou très âgées. Malgré le titre de l’ouvrage, ce n’est pas tant l’horreur de la guerre qui est ici exposée dans toute sa violence, mais surtout ce mystère que constitue la mort.