On a souvent déploré que seulement une partie de l’œuvre de Max Weber (1864-1920) était accessible en français. L’entreprise d’Élisabeth Kauffmann et de son équipe comble un vide, rendant disponible dans une traduction française inédite une importante série d’écrits politiques de l’un des fondateurs de la sociologie allemande.
L’ample présentation d’Élisabeth Kauffmann et l’introduction minutieuse de Catherine Collio-Thélène préparent le lecteur aux investigations de Max Weber, décrivant en une centaine de pages les contextes sociopolitiques de l’Allemagne et de la Russie à la fin du XIXe siècle.
Le premier chapitre reprend la leçon inaugurale que Weber avait donnée en 1895 à l’Université de Fribourg-en-Brisgau. Sa conclusion demeure aujourd’hui encore exemplaire : « Ce n’est pas la question de la situation économique des dominés, mais bien plutôt celle de la qualification politique des classes dominantes et montantes qui constitue en dernier lieu la teneur du problème de politique sociale ».
Ailleurs, le théoricien étudie le régime du suffrage, la fonction publique et la démocratie parlementaire de l’Allemagne du début du XXe siècle, au lendemain de la Première Guerre mondiale, dans des articles sur « L’Allemagne nouvelle » et sur « Le président du Reich » (que Weber voulait voir élu par le peuple, et non par l’Assemblée nationale). Parmi les articles les plus stimulants, je retiendrais « Droit de vote et démocratie en Allemagne », qui aborde le concept de droit de vote et aussi de distinction. En outre, un imposant chapitre intitulé « Parlement et gouvernement dans l’Allemagne réorganisée » occupe le quart de l’ouvrage, tandis qu’un discours sur « Le socialisme » datant de 1918 propose une relecture critique du Manifeste du parti communiste de Karl Marx et Friedrich Engels.
Par ailleurs, trois des dix articles étudient les mutations de la Russie à l’époque de la Révolution. De ceux-ci, un essai de 1917 sur « Le passage de la Russie à une pseudo-démocratie » restera longtemps d’actualité.
Destinés aux lecteurs déjà familiers de ses écrits, ces Œuvres politiques de Max Weber intéresseront d’abord les chercheurs en sociologie classique, en histoire de l’Europe et en relations internationales.