J’avoue mon parti pris : Serge Mongeau est de ceux dont le parcours mérite d’être connu. D’où mon insistance pour qu’il entreprenne son autobiographie.
Il serait regrettable, en dépit de la notoriété qu’a value à Serge Mongeau la réédition de La simplicité volontaire, que l’on passe sous silence le bilan civique et démocratique d’un homme aux multiples et cohérentes carrières. Quand, en effet, Serge Mongeau étudie la médecine, il est déjà au service des démunis et capable de faire honte aux autorités enseignantes ou cléricales qui prétendent renvoyer les humbles à leurs culpabilités. Quand Mongeau s’intéresse à la planification des naissances, il donne une voix à celles qui ne contrôlent ni leur vie affective ni les grossesses qu’on exige d’elles. Quand il juge que les études en médecine exigent des éventuels praticiens un effort tel qu’ils rompent avec la société concrète, il renonce à la lucrative profession et se réoriente vers le travail communautaire et l’intervention sociale. Sans l’avoir planifié, il habite Santiago au moment où Aliende tombe sous les assauts de la CIA et des possédants nationaux. Il confronte alors l’ambassadeur canadien à sa lâcheté.
Ce premier tome de l’autobiographie de Serge Mongeau empêche de réduire un parcours exemplaire au plaidoyer que Pierre Dansereau qualifiait gentiment de « joyeuse austérité ». Il n’y a rien d’austère chez le Mongeau qui puise dans le scoutisme de son adolescence les principes qui l’inspirent aujourd’hui encore. Aucune austérité non plus chez le militant qui échoue à faire comprendre à l’aréopage péquiste que mieux vaut une défaite électorale qu’un pacte de coexistence pacifique avec les brutes de Ville Jacques-Cartier. Pas davantage d’austérité dans les commentaires de Mongeau après sa détention arbitraire dans le sillage des énervements d’octobre 1970. Pareil cheminement manifeste à l’évidence qu’un homme libre trouve, bien avant la quarantaine, de multiples occasions de répondre avec courage aux questionnements sociaux.