Pour fêter ses 90 ans, un scribouillard sud-américain décide de « s’offrir une folle nuit d’amour avec une adolescente vierge ». Ainsi débute ce Mémoire de mes putains tristes qui annonçait – on pouvait le croire – une sorte de chronique libidineuse précédant une mort annoncée, mais qui tourne à l’hymne à l’amour au temps du viagra.
En effet, le vieux satyre qui n’a connu toute sa vie que des amours stipendiées, s’éprend follement de « la petite » que lui a trouvée sa vieille complice, la maquerelle du coin. Bien que jamais « consommés », leurs rendez-vous deviendront sa raison de vivre.
Le récit au « je »se développe au gré des événements qui se présenteront dans l’année qui suivra leur première nuit. La plupart sont sans rapport avec elle, mais servent de prétextes à l’auteur pour étaler les ratages de la vie de son héros et les petits riens qui composent ses journées.
Ni récit introspectif, ni retour nostalgique sur le passé, Mémoire de mes putains tristes se présente plutôt comme une fable optimiste sur le phénomène du vieillissement. Le roman se clôt sur une vision pleine d’espoir : « C’était enfin la vraie vie, mon cœur était sauf et j’étais condamné à mourir d’amour au terme d’une agonie de plaisir un jour quelconque après ma centième année ».
Ce côté utopique enlève d’ailleurs à cette histoire d’amour et de désir son coté scabreux. Quant à la plume du vieux (78 ans) Nobel colombien, disons qu’elle n’a rien perdu de son extraordinaire pouvoir de suggestion et de séduction.