« Bien qu’il fasse partie du pouvoir exécutif, le FBI a vocation de rester en retrait de la vie politique américaine », écrit l’ancien directeur du FBI, James Comey, dans un livre où il retrace les grandes étapes de sa carrière au sein de l’appareil judiciaire américain. Malgré des états de service plus qu’honorables, l’auteur d’Une loyauté à toute épreuve aura du mal à convaincre de la vérité de cette assertion ceux qui l’accusent d’avoir sabordé la campagne de Hilary Clinton et favorisé l’élection de Donald Trump.
Rappelons les faits pour ceux qui auraient été sur une autre planète à cette époque. Un an avant les élections présidentielles, en juillet 2015, on apprend que Hilary Clinton, alors secrétaire d’État, utilise un serveur privé par où transite une partie des courriels du département d’État. Dans sa position, utiliser un canal non sécurisé est interdit, car cela rend la politique étrangère américaine vulnérable au piratage informatique. Après une enquête minutieuse, le FBI reconnaissait en juillet 2016 que, si Hilary Clinton avait fait preuve d’une « grave négligence » dans l’exercice de ses fonctions, sa conduite ne justifiait pas le dépôt de poursuites criminelles contre elle. Or, à quelques jours du scrutin, le directeur du FBI annonce dans un mémo aux membres du Congrès que l’enquête est réouverte après la découverte de « nouveaux courriels » dans l’ordinateur de l’ex-conjoint d’une conseillère de Clinton. Même si le FBI déclarait quelques jours plus tard que ces courriels n’apportaient rien de neuf à l’enquête, l’élan de la campagne de Clinton, à la veille des élections, était irrémédiablement brisé.
Tout en reconnaissant que la ligne de conduite qu’il a suivie pouvait être discutable, aucune procédure ne l’obligeant à divulguer des informations sur une enquête du FBI en cours, Comey se défend de tout parti pris politique et affirme n’avoir agi que pour sauvegarder la réputation du FBI et la sienne, par ricochet : « J’avais déclaré sous serment […]que l’affaire était close. Maintenant je savais que ce n’était plus le cas. Garder le silence[…]serait un acte de dissimulation, ce qui reviendrait à dire que le directeur du FBI avait trompé et continuait de tromper le Congrès et le peuple américain ». En somme, il allègue pour sa défense avoir choisi de protéger la réputation de l’institution qu’il dirigeait, quitte à favoriser l’élection d’un candidat désastreux.
Lui-même donne la mesure de ce désastre dans le portrait qu’il fait du nouveau président. « Aspiré dans l’orbite de Trump, j’avais des flash-back […]lorsque je luttais contre la mafia. Le consentement par le silence. Le parrain qui contrôle tout. Les serments d’allégeance. La mentalité du ‘eux contre nous’. Les mensonges à tous les étages au service d’un code de loyauté qui plaçait l’organisation au-dessus de la loi, de la morale et de la vérité. » Tout son propos est en fait un désaveu « en creux » de Donald Trump. En se peignant comme un modèle de rectitude morale, Comey force la comparaison avec le comportement de l’actuel occupant de la Maison-Blanche, exercice dont ce dernier ne sort pas grandi, il va sans dire. Pour autant, les confidences de James Comey nous en apprennent peu sur le personnage et sur son mépris des valeurs et des institutions qui ont forgé l’Amérique. Finalement, Une loyauté à toute épreuve n’est ni une charge contre un président « moralement inapte à occuper la fonction », ni un mea culpasuccédant à une faute quelconque, mais un plaidoyer pour un retour de la morale et de l’éthique dans la gouvernance de l’Amérique.
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