Dans cet essai où se côtoient ancêtres, personnages de fiction et écrivains, Yvon Paré dialogue avec les romans de Nicole Houde et avec l’auteure elle-même, rapportant tantôt des discussions échangées, tantôt des lectures d’extraits.
Revisitant sa jeunesse et son œuvre littéraire, l’essayiste appelle le passé et l’écriture de « celle qui arrache le corps des femmes au regard des hommes » dans ses livres. Entre le « je » et le « tu », Paré raconte les derniers moments passés avec son amie, « ces rencontres où, après avoir ri tout notre soûl, nous nous avancions dans la nuit en convoquant nos personnages, évoquions des blessures qui refaisaient surface ». Il retrace aussi sa vie de jeune fille, de mère de famille, d’écrivaine.
Parsemant son essai d’extraits, Paré invite le lecteur à plonger dans l’univers romanesque de Houde et à y rencontrer ses héroïnes qui, comme leur auteure, ont voulu dire la douleur des femmes et briser la norme. « Je secoue la souffrance qui broie le corps et l’esprit des femmes », confie l’écrivaine à celui qui a aussi transcrit dans ses livres « ce que la famille avait toujours voulu taire et oublier. Les suicides, les viols, les hurlements qui ont envoyé des femmes à l’asile ». C’est sur ce point précis que se rejoignent ces deux amis : comme ils le disent si bien, tous deux sont des transfuges de classe. Jeunes, ils ont choisi de quitter leur lieu de naissance pour s’installer dans une autre vie et, plus tard, écrire des livres qui seront mal reçus par leur village et leur famille. Paré raconte les chantiers, la sueur, les moustiques. Houde expose le destin des femmes, leur asservissement biologique, leurs cris. Les deux dénoncent la violence des hommes, l’absence du père et la dureté de la mère.
Ainsi, au fil des pages, Paré montre comment leurs romans, leurs personnages et leur réalité se répondent. Faisant référence au premier roman de Houde, La malentendue, il écrit : « Ton récit est un Big Bang qui fait éclater tout ce que j’évite dans Anne-Belle et Le violoneux ». À partir de là, les voix des deux écrivains en vienent à se confondre dans le texte. D’un dialogue à l’autre, on ne sait plus à qui de l’homme ou de la femme appartient la première réplique. Mais cela n’est pas si surprenant puisque, comme le mentionne Paré, « nos livres se mélangent, même dans la réalité ». L’orpheline de visage est, certes, un dernier hommage à une écrivaine qui a marqué la littérature québécoise et à qui Paré a consacré plusieurs de ses chroniques, mais aussi et surtout le témoignage d’une grande amitié qui va au-delà de la littérature et de la mort.
L’ORPHELINE DE VISAGE
- La Pleine lune,
- 2018,
- Lachine
125 pages
21,95 $
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