« [J]e reste hors de tout j’attends. » Le ton est donné. Le poète se voit en sa présence-absence à lui-même, au monde dit « extérieur »… Il erre sans trop d’angoisse ‘ malgré certaines grandes peurs, celles qui nous habitent tous’, à la limite de son corps, de son être, de tout en fait. Il semble, à la fois, toujours être situé à distance de soi, de l’autre mais aussi enraciné afin de pouvoir dire, ébaucher un discours poétique qui fondera une incertaine identité. C’est ce que le poète, dans ce recueil, nomme l’« exil familier », un exil nécessaire et vain. « [Q]uand il s’oublie dans son élan / le geste d’être vous ramène / au creux craqué de la mémoire / au fond secret des jours allés / ce lieu de nulle part coulant / du pareil au même au pareil / aux lisières du monde en soi. » L’auteur poursuit : « [E]t vous poussez votre ombre vaine / à pas lents sur la neige sale / la nuit dans les rues de la ville ».
Nous allons, ainsi, tournant à vide à tous les carrefours que nous rencontrons… essentiellement seul: « [I]l faudra te résoudre à rester / celui-là / qui court dans sa chair ».