Le titre exprime un vœu imprégné d’urgence, comme si l’on voulait contrer un certain sentiment de lassitude, résister à ce qu’Hubert Aquin aurait perçu comme une fatigue à la fois politique et culturelle. Rares sont pourtant les textes soulignant que la conjoncture, à l’échelle mondiale et aux paliers québécois et canadien, redevient favorable au plaidoyer souverainiste ; ce sont cependant les plus marquants.
L’urgence fait surface dès le premier texte de Gilbert Paquette ; elle s’y présente, cependant, en danger résultant de l’érosion plutôt qu’en créneau particulièrement favorable. Charles Castonguay, à son habitude, livre des statistiques indiscutables et sombres ; l’assimilation, freinée par certaines dispositions législatives du Québec, favorise l’anglophonie. Seul un Québec indépendant pourrait, en échappant aux carcans de la Cour suprême, infléchir le cours de l’histoire. Urgence lourde de périls plutôt qu’occasion à saisir.
Certains textes aèrent le débat en évoquant des faits sous-estimés ou en liquidant tel et tel mythe. Pierre Paquette, en plus de souligner les complémentarités entre le Québec et l’Europe, met en exergue l’importance proprement québécoise de l’économie sociale. André Binette fait un sort à l’illusoire mythologie de multiples partitions du Québec au lendemain de l’indépendance : non seulement le Québec ne perdrait rien de son territoire, mais il s’agrandirait ! Il contrôlerait, en effet, un littoral qui, dans le régime actuel, relève d’Ottawa.
Jocelyne Couture signe un texte particulièrement stimulant sur les propensions sociales des Québécois : « […] les Québécois, dans leur ensemble, […] affichent leurs préférences pour des politiques et des institutions qui, non seulement les démarquent de la majorité des autres Canadiens, mais qui se distinguent d’une façon non ambiguë des valeurs de la droite, fût-elle centriste ». Cette remarque trop rarement offerte à la réflexion rappelle que, dans les gènes du PQ, se niche une connivence entre le penchant vers la fraternité entre humains et le plaidoyer identitaire. Signe québécois distinctif, connivence qui ne demande qu’à faire surface.
Plusieurs textes, y compris celui du préfacier Jacques Parizeau, entretiennent la flamme plus qu’ils ne précisent le message porté par le titre. Quelques-uns, tels ceux de Louis Bernard ou de Daniel Turp, se penchent sur les modalités d’encadrement ou de gestion du Québec futur ; on sera heureux, quand les événements se bousculeront, de la prévoyance de ces auteurs. Encore là, prudence plus qu’enthousiasme.
Ce n’est pas diminuer les mérites de ce travail collectif que de noter le peu d’intérêt porté à un climat politique qui, par son vide et ses dérives, appelle au renouvellement de la ferveur souverainiste.