Professeure de littérature québécoise à l’Université Queen’s, Lucie Joubert est en outre la directrice du CLEF, ou Comment l’Esprit vint aux Femmes Le titre de ce groupe de recherche sur les formes humoristiques de l’écriture au féminin en dit long sur l’intention. Tout comme l’essai dont il est question et qui se propose de cerner très sérieusement « les enjeux de la présence des femmes en humour ». Il faut dire que les clichés sont légion, poncifs selon lesquels une femme doit être belle et se taire tandis que celles qui font de l’humour n’ont vraiment, les pauvres, rien d’autre pour elles ! Quant aux humoristes reconnues, il semble qu’elles n’auraient guère intérêt à être par surcroît séductrices
Lucie Joubert s’emploie donc à dissiper les malentendus, en faisant la part belle notamment à Suzanne Jacob, chroniqueuse à La Gazette des femmes de 1981 à 1991 qui incarna un personnage de perdante, et à Hélène Pedneault, qui anima la chronique délinquante de La vie en rose. Et même si le « militantisme, de quelque nature qu’il soit, s’accommode mal du rire ». Il reste que les thèses que défend Lucie Joubert font mieux que se défendre : elles forcent à réfléchir à des phénomènes que l’on aurait pu croire anecdotiques et qui sont en réalité très symptomatiques de la société dans laquelle on vit, de laquelle on rit. La « solution » est peut-être dans l’humour engagé, à l’antithèse (ou dans l’opposition ?) des blagues faciles ou grasses qui finiront peut-être par ne plus faire rire personne.
Alors, deux poids, deux mesures, ici comme ailleurs ? « On est loin du jour où ne subsistera qu’un humour universel qui aura réussi à annuler les différences. On est loin du moment où, consciemment ou non, notre esprit aura cessé d’appliquer le double standard à la parole des femmes et qu’il entendra un texte asexué. Et c’est tant mieux. »