Le sympathique Panda examiné sous tous les angles. Un exercice réussi de vulgarisation de la science biologique évolutive.
Le Panda est une vedette du règne animal et Cyrille Barrette énumère quelques caractéristiques responsables de la cote d’amour à son endroit : « Son nom est familier et facile à retenir ; il nous paraît enjoué, maladroit, placide, potelé ; on le devine doux au toucher ; on le sait rare, menacé et mystérieux, vivant dans des contrées lointaines et exotiques ; enfin, ses beaux grands yeux noirs lui donnent une expression triste ». Si ces traits peuvent sans doute être appréciés par l’auteur de L’étonnant Panda, c’est sur un autre plan que se situe le propos de son essai. Professeur émérite de biologie à l’Université Laval, ayant écrit des ouvrages où il fait la part belle à la méthode scientifique, Cyrille Barrette n’est pas le premier venu en matière de connaissance des ours. Il fréquente en effet la famille des ursidés depuis des décennies et compulse la documentation sur le cas du Panda depuis plus de 35 ans.
Le biologiste explique d’abord en quoi consiste sa méthode, qu’il nomme la « morphologie écologique comparative ». Grosso modo, elle permet d’avancer des interprétations en se basant sur des observations concrètes et un cadre théorique éprouvé, en l’occurrence la théorie de l’évolution par sélection naturelle. Avant d’appliquer cette méthode au Panda, l’auteur précise que son regard se porte sur l’espèce « grand Panda », et qu’il écrit Panda avec une majuscule pour éviter la confusion avec le « petit panda », ou panda roux, une espèce qui a peu en commun avec la vedette de son essai. Le nom du Panda est d’ailleurs l’occasion pour le biologiste d’aborder la question de la taxonomie. « [O]n ne nomme pas pour le plaisir de nommer, mais pour localiser l’espèce sur sa branche dans l’arbre de la vie. » Or, il se trouve que les huit espèces vivantes de la famille des ursidés se répartissent en deux branches, dont l’une ne comporte que le Panda. Ce n’est là qu’une des multiples caractéristiques du Panda abordées dans ce livre et faisant de lui un objet de curiosité.
On apprend ainsi que le Panda est le plus ancien des ours connus, « une sorte de relique vivante d’une lignée ancienne ». Envisageant la répartition écologique des huit espèces d’ours de la planète selon leur régime alimentaire, Cyrille Barrette fait remarquer que, si tous sont plus ou moins omnivores, le Panda demeure celui qui l’est le moins, puisque son régime est généralement constitué exclusivement de bambou. De plus, l’actuel mode de vie herbivore du Panda contraste avec la lignée évolutive carnivore dont celui-ci est issu. Mais son penchant marqué pour le bambou se révèle en fin de compte une stratégie efficace : « [L]e Panda arrive à avoir une belle carrière d’herbivore grâce aux cinq atouts qu’il a acquis : une sélection attentive de sa nourriture, une mastication efficace et raffinée, une ingestion de grandes quantités de bambou, une digestion limitée au riche contenu cellulaire et un transit digestif accéléré ». Parlant de transit accéléré, avis aux personnes qui pourraient avoir envie d’élever un Panda à la maison : il leur faudrait non seulement lui fournir quotidiennement jusqu’à 45 kilos de sa plante préférée, mais aussi trouver à disposer de ses fèces, produites jusqu’à cent fois par jour !
Le biologiste conclut en rappelant que le Panda est une espèce « parapluie », comme l’éléphant et le tigre, qui vivent chacun dans un type particulier de forêt. Préserver les milieux essentiels à la survie de ces animaux est un gain non seulement pour eux, mais aussi pour l’ensemble du vivant, y compris les humains. Dans cet essai, Cyrille Barrette privilégie une langue précise et accessible, ses métaphores sont significatives et, surtout, l’enthousiasme est palpable dans son écriture.