Il ne peut pas convaincre une convertie. Je suis une athée laïque pétrie de doutes, mais pas une agnostique. Par contre, André Compte-Sponville est un athée fidèle. La ligne était mince entre la foi en un dieu et la fidélité (« C’est ce qui reste de la foi quand on l’a perdue ») à un principe.
L’auteur n’est pas tombé dans les clichés même quand il répond aux questions qui forment ses trois chapitres : Peut-on se passer de religion ? Dieu existe-t-il ? Quelle spiritualité pour les athées ? Il parvient à offrir du nouveau avec des idées qu’il réchauffe depuis pas mal d’années dans les séminaires, les conférences, les précédents livres. Le Comte-Sponville prend du bon en vieillissant. Il révèle quelques incartades intimistes qui rendent le personnage moins grandiloquent et la démonstration parfaitement décisive.
Son raisonnement est implacable et notre adhésion complète quand il s’interroge sur l’espoir : à force d’espérer le mieux pour demain, on vit « séparé du bonheur par l’espérance même qui le poursuit ». Comme il est plus facile de remettre ses désirs entre les mains de Dieu (c’est ça l’espérance) qui palliera à l’essentiel, on ne se donne pas les moyens de désirer ce qui dépend de soi (volonté). Ainsi, mieux vaudrait croire en l’inaccessible (qui correspond à tous ses vœux les plus fous) que de vivre le présent avec toute sa bordée de violences et de petites mesquineries.
André Compte-Sponville se surpasse en invoquant la preuve ultime de la futilité de Dieu : le fameux sentiment océanique. Quand on a vécu le tout en soi et le soi en tout, plus besoin d’un Dieu qui prendrait le tout dans ses mains et se reposerait le septième jour.