Toronto : une mère, ancienne reine de beauté superficielle et arrogante, quitte le foyer et disparaît. Alors que le mari désemparé s’installe dans l’attente, Louise, neuf ans, fille unique, ne la regrette pas : en quête d’une mère, elle l’a en quelque sorte toujours été. Puis madame Carver, une veuve perspicace et généreuse, est engagée et prend la maisonnée en main : mère substitut ? Pas vraiment, car Louise, qui s’est entichée d’une nouvelle voisine, madame Richter, rêve d’être adoptée par cette famille allemande. Au fil du temps, Louise et Abel, le fils adoptif des Richter, deviennent amis, puis amoureux. Le monde de l’enfance décrit par Barbara Gowdy nous est plus ou moins familier : la curiosité, les connivences, l’amitié, l’exclusion, la trahison, les cruautés et le rêve accompagnent la fillette jusqu’à l’adolescence car, comme le font tous les enfants, Louise se raconte des histoires
Le véritable intérêt du roman de Barbara Gowdy tient aux thèmes, traités avec justesse et sensibilité, de l’amour, débordant et exclusif, de l’attente et des illusions qui la nourrissent, du cercle infernal du manque et de l’image, fugace et toujours forcément plus petite ou plus grande que nature, que l’on se fait d’autrui. « Il me vient à l’esprit que la distance à laquelle je semble le tenir en ce moment est exactement celle qu’il a toujours maintenue entre lui et le reste du monde. Comment faire, autrement, pour préserver l’illusion que les gens que l’on aime sont parfaits ? Ou que l’on peut supporter de les laisser partir ? »
C’est une histoire triste, mais jamais larmoyante, que celle de cette jeune femme qui se tourne vers son rêve éperdu d’amour en y investissant tous ses espoirs. Les amours contrariées de Louise la mèneront cependant à reconnaître que l’être énigmatique sur lequel elle a projeté toutes ses attentes n’est pas celui dont elle a rêvé. Car la vie et les êtres sont souvent insaisissables.