Les humanités numériques (HN ou humanités digitales) font référence à la numérisation des données et des savoirs dans les sciences humaines et sociales (SHS). Sans se limiter à un simple archivage de données et de textes, cette numérisation a pour but ultime de cataloguer, d’indexer et de faire dialoguer ces mots et ces images afin de mieux les articuler selon de nouveaux outils de repérage. Pour Dominique Vinck, professeur de sociologie des sciences à l’Université de Lausanne, les HN « forment un espace interdisciplinaire qui réunit SHS et sciences et technologies de l’information (STI) au niveau de la recherche et du développement de nouveaux outils ». En guise d’exemples européens, on mentionne l’Index Thomisticus de saint Thomas d’Aquin ou encore le Trésor de la langue française. Les tenants des HN prétendent faire la synthèse entre les savoirs archivés et les nouvelles technologies capables de les classer et ultimement de les diffuser virtuellement au moyen de moteurs de recherche de plus en plus efficaces.
Spécialiste des nanotechnologies et de la mondialisation, Dominique Vinck donne un portrait optimiste des possibilités offertes, mais rappelle du même souffle les principales craintes alimentées par ces moyens puissants de contrôle détenus par quelques grandes corporations qui fonctionnent en langue anglaise : « Les humanités numériques, c’est la dématérialisation du patrimoine culturel » ; mais, ajouterait-on, cette dématérialisation ne doit pas nécessairement mener à la destruction massive des archives sur papier, comme le déploraient les auteurs du livre Science in Print: Essays on the History of Science and the Culture of Print (University of Wisconsin Press, 2012).
Les HN sont à la fois le meilleur et le pire, c’est-à-dire tout ce que les usagers en feront, avec ces risques d’uniformisation, de marchandisation, de nivellement par le bas et la crainte de voir la culture réduite à des expressions superficielles, mercantiles et aguichantes, comme on le constate souvent sur des sites Internet hébergés sur des plateformes d’actualités et de nouvelles du jour comme Yahoo. Les espoirs restent grands depuis quinze ans : rendre accessibles et gratuits les savoirs emmagasinés depuis des siècles, mais encore faudra-t-il former des usagers réceptifs qui seront sensibles à la véritable valeur de ces ressources et capables de les apprécier. À l’ère du présentisme décrié par l’historien François Hartog, le principal défi des HN sera de réaffirmer la pertinence du passé. Comme on peut le deviner, Les humanités numériques est disponible sur papier et en livre électronique.
ESPACE PUBLICITAIRE
DERNIERS NUMÉROS
DERNIERS COMMENTAIRES DE LECTURE
Loading...
DERNIERS ARTICLES
Loading...