Après avoir écrit une trentaine de pièces de théâtre, seul ou en collaboration, Monsieur Lavigne nous offre Les deux sœurs.
Mathilde a environ dix ans et Pauline, huit. Dans l’instant de la pièce, elles vivent seules avec leur père. La mère est en voyage dans les vieux pays, en France précisément (vieux pays : cette expression m’a toujours fait sourire et elle amuse aussi les deux sœurs).
Bien sûr, les filles s’ennuient de leur mère. Rien ne fonctionne aussi bien quand elle est absente. On n’est pas réveillé de la même façon ; les tentatives de peignures ne tiennent pas le coup ; on se demande si le lunch a été fait ; on cherche tout dans la maison ; la vie continue, quoi, mais avec un ordre différent. Arrive le facteur, un personnage loufoque qui livre ses lettres en chantant (un peu comme dans les contes). Il vient annoncer la visite de Juliette, une amie des filles. Elle débarque de France, pour deux semaines. Juliette, dans le souvenir des deux sœurs, c’est l’image d’une braillarde capricieuse qu’on a vue et qu’on n’a pas envie de revoir. Mais le temps a bien transformé Juliette qui est pratiquement devenue une femme. Alors, l’aînée, Mathilde, troque le carré de sable et l’arbre où elle avait fait une cabane avec sa jeune sur pour les talons hauts, les séances de maquillage et le magasinage compulsif avec Juliette.
La petite Pauline est laissée de côté, utilisée comme accessoire aux jeux des grandes, quand cela adonne. Pas facile à vivre ! Mais vrai, tellement vrai.
C’est ce qui fait la beauté de cette pièce : sa profonde et vaste vérité.
Dans une postface très intéressante, l’auteur nous parle d’ailleurs de sa propre expérience de la paternité. Il nous dit que c’est en observant ses proches qu’il trouve la tension, l’intensité nécessaire à la création théâtrale. Il nous parle également des influences qu’il a subies, dans le sens grandissant du terme, tout au long de sa carrière d’auteur dramatique.
Sa réflexion est prenante. Louis-Dominique Lavigne ne fait pas qu’écrire le théâtre, il l’aime et c’est en cadeau qu’il offre Les deux sœurs à ceux qui sont les plus opprimés et les plus négligés sur terre : les enfants.