Le titre, malgré sa précision et peut-être à cause d’elle, risque d’effrayer. Ce serait dommage, car Arnaud Balvay livre avec clarté et rigueur une masse d’informations rarement regroupées. Il rattache (mieux que notre nombrilisme québécois) la Louisiane et le Pays d’en Haut. Il évalue les stratégies d’occupation et surtout les forts. Il constate que la France ne cherche pas l’implantation. Quant aux troupes expédiées par la France, Balvay est net : « […] les militaires envoyés par la France en Amérique du Nord entre 1683 et 1755 appartiennent tous aux troupes de la marine ». C’est à eux d’abord que l’auteur s’intéresse. Ces soldats vivront longuement dans des endroits secoués par tous les commerces. Ils sont si mal approvisionnés qu’ils doivent tout aux Autochtones. La traite, plus qu’une preuve de cupidité, est une condition de survie. Mariages, unions « à la mode du pays » et métissages s’ensuivront. Les missionnaires regardent ailleurs ou régularisent les choses… un ou deux enfants plus tard. Même les stratégies militaires se compénètrent, jusqu’à ce que la « petite guerre » à l’indienne et la « grande guerre » à la Montcalm s’emboîtent. Malgré l’osmose, certains traits marquent toujours la société autochtone. Balvay fait voir que jamais l’Autochtone ne renonce à son autonomie. Les chefs autochtones paraissent inutiles à Vaudreuil, car « ils n’ont aucun pouvoir coercitif sur leurs concitoyens et sont donc incapables de relayer les ordres qu’ils pourraient recevoir des Français ».
Le travail de Balvay est de ceux devant lesquels on s’incline en hochant la tête : « Comment diable a-t-il fait ? »