Ce quatrième ouvrage de Louis Francœur (le deuxième posthume) aborde la sémiotique du théâtre dans une perspective pragmatique, proche de celle du grand théoricien américain Charles Sanders Peirce. Le théâtre brèche considère l’œuvre dramatique non seulement comme un texte mais surtout en tant que spectacle porteur de signes et témoignant en outre d’une culture spécifique. Il en résulte un ouvrage théorique dense et rigoureux, mais toutefois moins austère que Les signes s’envolent (1985) du même auteur, avec relativement peu d’analyses approfondies et beaucoup de courtes citations (de Samuel Beckett à Michel Tremblay, en passant par Jean Giraudoux).
Du point de vue théorique, le meilleur chapitre du livre reste celui consacré au lisible et au visible, où l’auteur articule le concept de culture pour ensuite cerner ceux de texte et de signe. Le sixième chapitre, consacré aux répétitions dramatiques et au « work in progress », est tout aussi stimulant et permet à Louis Francœur de baser ses démonstrations théoriques sur les premiers textes de Michel Tremblay et les mises en scène de Robert Lepage. On se laisse parfois emporter par ce livre exigeant où l’auteur fait preuve d’une grande culture littéraire. Mais il s’agit davantage d’un essai sur la sémiotique destiné aux spécialistes plutôt qu’un livre sur le théâtre et la mise en scène. Il confirme la place importante occupée par Louis Francœur (1931-1998) dans l’enseignement de la sémiotique au Québec.
Comme ce champ d’étude appelle inévitablement un vocabulaire particulier, on trouvera en fin de volume un très utile glossaire des termes sémiotiques propres au théâtre, couvrant une vingtaine de pages.