Jean-Paul L’Allier a connu un parcours atypique avant de devenir maire de Québec, de 1989 à 2005 : député libéral puis ministre, il a ensuite bifurqué pour le camp du « oui » lors du premier référendum sur la souveraineté-association du Québec, en 1980.En plus d’avoir chapeauté trois ministères (dont celui des Communications) dans le premier gouvernement Bourassa, Jean-Paul L’Allier (1938-2016) a été un témoin privilégié de la Révolution tranquille : il était présent près du balcon de l’hôtel de ville de Montréal lors du fameux « Vive le Québec libre ! » du général de Gaulle ; il côtoyait Pierre Laporte juste avant la crise d’Octobre en 1970 et faisait partie du gouvernement libéral lors des 500 arrestations arbitraires. « Mais on a été manipulés par la police », expliquera l’ancien ministre, qui reste amer en se remémorant ce traumatisme collectif.C’est la (re)lecture des événements qui fait souvent la justesse des interprétations de Jean-Paul L’Allier. À propos de l’aéroport de Mirabel, il parle du « plus grand gâchis politico-administratif du dernier siècle, au Québec ». Il en rappelle le contexte : « L’Union nationale, au pouvoir à Québec, voulait à Drummondville l’aéroport international qui devait remplacer Dorval, à mi-chemin entre Québec et Montréal. Les fédéralistes le voulaient à mi-chemin entre Montréal et Ottawa pour rapprocher les deux capitales [sic] ». Autre diagnostic de l’ex-ministre, redevenu consultant privé, sur l’incurable bureaucratie du gouvernement provincial : « […] on ne peut pas demander aux fonctionnaires du Conseil du trésor ou d’autres instances de faire, seuls, l’évaluation des politiques et des programmes des ministères puisqu’ils étaient impliqués et qu’on en arrive vite ainsi à se renvoyer les ascenseurs dans la haute fonction publique, pour protéger les acquis et freiner toute éventualité de réforme et de mise à jour ».Contrairement à ce que le titre annonce, on n’a pas l’impression que cet ouvrage comprenant une conclusion de l’auteur est inachevé. Membre de la Société des Dix, le grand historien Gilles Gallichan a méticuleusement parachevé cette autobiographie en lui ajoutant des notes explicatives, des extraits d’entretiens et quelques passages du livre précédent de Jean-Paul L’Allier, Les années qui viennent (1987), ouvrage méconnu qui fut recensé dans le Dictionnaire des œuvres littéraires du Québec. Les indispensables notes en bas de page – ajoutées par Gilles Gallichan – contextualisent les personnages et événements mentionnés au fil des pages.Communicateur habile, Jean-Paul L’Allier écrit admirablement bien et son autobiographie se lit plaisamment. Contre toute attente, ce sont les premiers chapitres racontant l’enfance de l’auteur qui semblent les plus touchants, mais aussi ses huit années comme pensionnaire, ses années d’université, sa fréquentation des bibliothèques publiques et son choix de carrière vers le droit.
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