Jean Royer a beaucoup fait pour la poésie québécoise. Il a côtoyé plusieurs générations d’auteurs, leur a donné la parole et les a écoutés et lus avec une grande acuité. Même dans ses propres recueils, il a fait une grande place aux poètes et leur a rendu hommage, comme il le fait encore dans Le poème debout avec une ferveur perceptible, celle du lecteur, ce qu’il est avant tout, ce que se devrait d’être tout poète.
Ce livre est le fruit d’un rapaillage de divers textes de Jean Royer, publiés en revue ou tirés de publications au tirage désormais épuisé. L’unité et la cohérence subtile du projet tiennent dans le fait que ce sont là des textes d’hommage à divers poètes, notamment Gaston Miron, Roland Giguère, Rina Lasnier, Emily Dickinson et Philippe Jaccottet, mais aussi à la poésie. C’est d’ailleurs dans cet hommage à la poésie elle-même que les textes sont le plus personnels et sentis. Il s’en dégage une certaine vulnérabilité du poète devant cet espace infini que convoquent les mots, même les plus simples. L’auteur s’y exprime sans artifice, souvent à la manière lapidaire d’Eugène Guillevic : « Trou de mémoire – / une voix d’avant moi / me traverse » ; « Tu es ce mot / Que tu lis / Tu es sa mémoire ».
Il est difficile de ne pas voir l’image de l’arbre dans le titre du recueil, qui se tient droit dans sa dignité, de même que sa patience et sa très méticuleuse persévérance devant ce qui le nie, le blesse, l’étouffe. Le poème, comme l’arbre, demeure ouvert en ses ramifications, tant racinaires qu’aériennes, tenant à la fois de ses influences et de ses développements à venir.
Il faut être très attentif devant ce livre. À le parcourir trop vite, on peut glisser rapidement sur cette humilité qui fait sa force et se laisser déconcentrer par certaines facilités et quelques lieux communs, dont ce fameux « silence » qui hante de nombreux poètes et qui revient à quelques reprises dans le recueil. Les lecteurs impatients qui cherchent l’éblouissement pourraient ne pas y trouver leur compte, mais ceux qui écouteront les mots sans les presser au rendement comme l’on presse le monde actuellement arriveront à destination aux côtés du poète, debout dans le poème, dans « [c]ette présence / Qui nous tient ensemble / [et qui] Demeure du silence ».
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