L’enjeu qu’évoque Henri Bellotto mérite l’attention la plus aiguë, mais le traitement qu’il lui applique en feutre peut-être la portée. Le fait brut est là : cloner un être humain, c’est créer un réservoir de pièces de rechange à portée de main des riches et des pervers. Risque effroyable. Lucide par rapport à cette possibilité, Bellotto accorde, néanmoins, trop d’importance à un cas particulier pour que le clonage humain demeure aux yeux de tous ce qu’il est : une infamie.
La découverte de deux cadavres d’enfants remplit d’horreur : « J’ai pu confirmer ce que les différentes cicatrices laissaient supposer, à savoir que l’enfant a subi une ablation du rein gauche, qu’on lui a enlevé les deux yeux, sans doute pour une récupération de la cornée, et qu’on a fini par procéder au prélèvement du cœur ». Pourquoi cette boucherie ? Parce que l’enfant dont on a tiré une copie a eu besoin des organes de son double. Parce que les responsables du clonage avaient conclu avec les parents de l’enfant ainsi copié un pacte déshonorant : « Votre enfant survivra à ses déficiences physiques en mutilant un enfant minutieusement semblable à lui. Parce que les pièces de rechange arrachées à un humain utilisable assurent la survie du privilégié et condamnent le clone à la peine capitale ».
L’auteur édulcore l’horreur de ce parasitisme meurtrier lorsqu’il fait de la fillette avantagée par ce pacte un jeune être porté au sadisme. Il la rend antipathique pour les mauvaises raisons : Nelly serait-elle moins cruelle que le clonage demeurerait tout aussi répugnant. Sur cette lancée, Bellotto conclut d’une façon moins injuste pour le clone, au risque de laisser l’impression que le clonage humain peut parfois récompenser la vertu.
Autre risque consenti par l’auteur, le rôle confié au sympathique enquêteur Stankov. Ici encore, la sympathie accordée à un policier aussi rebelle que le veut la modernité occulte la question centrale : le clonage est-il, oui ou non, irrévocablement un crime contre l’humanité ? Le lecteur s’éloigne de cette interrogation lorsqu’il lit ceci : « Tu vas te rendre à Toronto, au Canada. Le clonage humain est en train de prendre une vitesse de croisière là-bas, et ils ont besoin de notre expérience pour l’enrayer ». L’intérêt dramatique y gagne, mais le crime y perd de sa gravité.
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