Onze chercheurs du milieu universitaire regroupent leurs voix dans cet essai troublant et richement documenté pour mettre en garde contre la montée du masculinisme.
Loin d’être un mouvement d’évolution sociale portant un message de justice et d’égalité, le masculinisme est plutôt un contre-mouvement aux visées régressives : toute émancipation, telle celle conquise par les femmes en Occident, entraîne une réponse contre-révolutionnaire de la part des anciens maîtres qui se mobilisent pour récupérer leurs prérogatives perdues.
De l’instrumentalisation des enfants par des conjoints violents qui veulent conserver leur emprise sur l’épouse en cas de divorce jusqu’aux poursuites quérulentes contre des politiciennes et des chercheuses féministes, les masculinistes ne manquent pas de tactiques pour faire taire les propos qui ne cadrent pas avec leur vision des faits.
Pourtant, l’essence du discours masculiniste s’avère mince, ne consistant souvent qu’à opposer moqueries et agressions verbales (il suffit de songer aux étiquettes « mal baisées » et « lesbiennes frustrées » accolées aux femmes idéo-progressistes) aux porte-parole des chaires féministes. La violence contre les idées, en somme.
Un sous-groupe masculiniste plus instruit composé de chercheurs, de journalistes et de thérapeutes propose des théories où la symétrie (de la violence et du sexisme, entre autres) chez les deux sexes cohabite avec des statistiques détournées. Par exemple, ce groupe dénonce souvent le désarroi dans lequel est plongé le mâle québécois en perte d’identité devant des femmes castrantes ; ce désarroi serait à l’origine du haut taux de suicide chez les hommes. Or, ces chercheurs omettent de révéler que le groupe d’hommes où le taux de suicide est nettement supérieur à la moyenne et fait gonfler les chiffres, c’est celui des jeunes homosexuels, une caste largement méprisée par les masculinistes purs et durs
Bref, ce livre remet les pendules à l’heure en cette ère de triste retour en arrière.