Amélie Nothomb, auteure prolifique belge, vient de signer, comme chaque année à la rentrée, un court roman. Dans Le crime du comte Neville, elle emprunte l’image de l’aristocrate obsédé par les prédictions d’un chiromancien qu’Oscar Wilde avait décrit dans sa nouvelle « Le crime de Lord Arthur Savile », parue en 1887. Ce pastiche traduit avec cynisme les conventions sociales des membres de la noblesse, dont l’auteure est elle-même issue. Encore une fois, Amélie Nothomb, née Fabienne Claire Nothomb, ajoute au roman un clin d’œil autobiographique.
Sérieuse est une adolescente qui grandit dans une famille noble. Une nuit, une voyante la sauve d’une mort certaine alors qu’elle explore la forêt. Quand son père vient la chercher, la voyante lui prédit qu’il tuera l’un de ses invités pendant sa fastueuse fête annuelle. Le comte de Neville accepte son destin de meurtrier et souhaite donner raison à l’avenir. Son plus grand tourment concerne l’identité de celui qu’il choisira de tuer, puisqu’en tant qu’homme du monde, il se doit d’être stratégique afin de garder son statut dans sa société. Sérieuse, sa fille, lui tend la main dans son dilemme en lui proposant de se sacrifier pour atténuer le désarroi qui blanchit ses nuits.
Depuis toujours, le comte fonde sa vie sur l’art de recevoir. Ce qui peut paraître banal pour le commun des mortels prend dans ce livre une tout autre signification et guide même les personnages dans les comportements à adopter et le choix de leurs valeurs. Ils jouissent d’un modèle de vie inspiré d’histoires à dormir debout. Les lecteurs pour qui le qu’en-dira-t-on n’est que parole au vent n’en croiront pas leurs yeux. Fait d’énormités sur les conventions sociales des hautes sphères de la société, le discours désillusionné du père en détresse reste curieusement convaincant. Par conséquent, l’effet est réussi : impatient de lire la fin, on ne peut que dévorer ce petit roman ! On ne veut pas croire à ce qui se passe, on vit dans le déni, on se refuse d’adhérer aux propos de Neville. Le dénouement ne tient malheureusement qu’en quelques lignes, mais il nous satisfait.
Le crime du comte Neville est d’une lecture agréable ; l’écriture de Nothomb se démarque par les quelques images puissantes qui surgissent de ses mots, comme plusieurs petits coups de théâtre qui font du bien et qui portent à réfléchir…
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