Les collectifs présentent rarement des textes de calibre constant. On ne leur en veut pas pour autant ; organisés autour d’un thème sur lequel ils projettent une variété d’éclairages, ils rachètent par un texte génial les lacunes de certaines contributions ou donnent la parole à des auteurs qui n’en sont pas encore à séduire des auditoires différenciés. Le collectif auquel on doit L’aurore ne mérite guère ces diverses circonstances atténuantes : ni thème rassembleur, ni présentation éclairante des auteurs, ni maintien de la rédaction à un palier raisonnablement respectable. C’est dommage, car certaines signatures justifient déjà de grands espoirs et des audaces percent qui promettent une relève littéraire de grand intérêt. Je pense ici à « Copie conforme », à « Ce que je cherche », à « Mater obscura ». D’autres textes, en revanche, s’engluent, comme trop de romans d’aujourd’hui, dans un érotisme de pacotille dont on espère voir bientôt la disparition ou dans un délire dont l’auteur est le seul à jouir.
L’éditeur, dont je ne sais rien, porte sa part de responsabilité dans ce résultat au mieux mitigé. Il ne sait visiblement pas où et quand la barre d’espacement doit intervenir. Que survienne un point, une virgule, un point-virgule, un deux-points, la phrase ne respire pas davantage dans un cas comme dans l’autre. Le vocabulaire, de toute évidence, n’a fait l’objet d’aucune révision. Ainsi, ce verbe déporté loin de son sens : « Se ciselant un passage jusqu’à mon cœur ». Ou encore, ceci : « Morcelé par mille pensées autres que celles d’arrêter ».
Je m’en voudrais si cette apparente sévérité éteignait en qui que ce soit le goût d’écrire. Le potentiel est là. Il s’agit d’y ajouter un travail sérieux.