L’antisémitisme, comme toutes les repousses du racisme, est un chancre contre lequel beaucoup utiliseraient la cautérisation. On souhaite donc le détecter le plus tôt possible. De là surgit le risque d’en pressentir la montée dès le bourgeonnement et de postuler d’avance la contamination de la société. L’enquête de Raymond Ouimet sur l’affaire Tissot n’évite pas complètement ce risque. Entre Tissot et la société outaouaise, il y a quand même une marge. Il est honteux et inadmissible qu’un torchon comme Le Patriotesévisse et salisse, mais toute la population était-elle atteinte de la peste ? « Freiman a raison d’avoir peur. Le Juif des années 1930 et 1940 est un être traqué auquel on s’attaque bien souvent impunément. » La preuve ne soutient pas ces généralisations. Ouimet glisse lui-même au procès d’intention : « Le fait que Tissot ait pu discourir à la Salle Notre-Dame, à Hull, donne à penser que les autorités oblates avaient un préjugé favorable envers l’homme et ses théories antisémites ». Autre raccourci : « […] le fascisme canadien-français est essentiellement fédéraliste ». Essentiellement n’est-il pas un peu fort ? Le sous-entendu règne en maître dans d’autres passages encore : « Comme les archives du Parti national n’ont jamais refait surface, on peut non seulement se demander si elles ont été détruites, mais si la GRC a cherché à protéger des personnages en vue ». La meilleure arme pour combattre le gluant antisémitisme serait-il de lui intenter des procès d’intention ?
(Sur une note moins sérieuse, Ouimet devrait retirer à Aurèle Joliat le statut de gardien de but qui appartenait plutôt à Georges Vézina… Le petit Joliat, lui, remplissait les buts…)