Un livre hommage aux Madelinots et à la chasse traditionnelle au loup-marin, appuyé par une riche documentation photographique.
Les images qui illustrent La glace vivante sont l’œuvre de Ronald Labelle. Le photographe et artiste verrier a vécu plus de 50 ans aux Îles-de-la-Madeleine. Lors de son décès en février 2024, à l’âge de 81 ans, il était résident de Pointe-Basse. Son admiration pour les gens des Îles et pour leur rapport à la mer ne s’est jamais démentie. Les derniers mots de son avant-propos au livre affirment une fois de plus son attachement : « Lorsque je partirai, la dernière image que j’aimerais emporter au large, ce n’est pas celle d’un paysage, mais plutôt des visages… »
La page des crédits attribue la recherche et la rédaction au poète Sylvain Rivière, l’édition à Serge Lambert et à Caroline Roy. Et il faut dire que l’ouvrage s’avère déroutant, au vu de l’organisation bancale de son contenu. Au fil des pages, on a l’impression qu’un bassin de photographies, aux qualités artistiques et documentaires indéniables, a été couplé à un corpus de textes disparates dont le rapport aux images est rarement évident. Dans tout le livre, les photos ne sont accompagnées d’aucune légende à proprement parler. On ne sait rien de la date et du lieu de la prise de vue. Les personnes, les objets et les éléments naturels ne sont pas identifiés. Les courts textes d’accompagnement, tirés d’une diversité d’ouvrages, sont généralement associés à un titre, rarement à un auteur, parfois à un titre et à un auteur. On retrouve les sources principales dans une bibliographie, par ordre alphabétique de noms d’auteur, mais il y a de nombreuses exceptions. Par exemple, en page 196, un extrait du recueil Rêves à vendre de Félix Leclerc est cité en bonne et due forme, avec la date et le nom de la maison d’édition, ce qui explique sans doute son absence de la bibliographie. Quelques textes poétiques n’étant pas signés, on devrait peut-être les attribuer à Sylvain Rivière, mais d’autres sont nommément identifiés à cet auteur, alors on ne peut que supputer. Une section d’une quinzaine de pages est intitulée « Témoignages ». On présume que leurs auteurs sont des chasseurs, mais on n’a droit à aucune information sur le contexte de collecte de ces témoignages. On aurait par ailleurs aimé que soient données quelques définitions des mots typiques des Îles et de la chasse, qui pullulent dans les textes.
Malgré tout ce qui précède, le livre offre une riche impression de proximité avec les chasseurs de phoques madelinots des années 1970. Les photographies captées sur le vif sont criantes d’authenticité. Les textes eux-mêmes, informatifs ou poétiques, récits de drames, contes et chansons, bien que formant une courtepointe bigarrée, permettent d’approcher par touches successives une réalité hors du commun. Plutôt qu’un récit à parcourir du début à la fin, le livre est conçu comme un album auquel on peut accéder par diverses entrées. L’ouvrage ne sera pas de trop pour mieux faire saisir l’importance de la chasse au loup-marin pour la population des Îles-de-la-Madeleine. Il faut même espérer qu’il fasse partie d’un mouvement de fond, qui fera taire définitivement les détracteurs de cette activité traditionnelle et vitale.