Avec la hausse continue des prix de l’essence, plusieurs s’interrogent sur la place du pétrole dans nos sociétés modernes, sur la nécessité, dans un contexte de lutte aux changements climatiques, de penser plus sérieusement à des sources d’énergie moins volatiles et moins dommageables pour l’environnement. Ce que l’on sait moins, c’est notre extrême dépendance à l’or noir, et combien notre économie et notre niveau de vie dépendent pour beaucoup d’un approvisionnement constant en pétrole. « De toutes les matières premières, le pétrole est celle qui aura connu l’existence la plus brève, alors que nous pensions que notre prospérité sans équivalent serait éternelle. Née avec le pétrole, cette prospérité disparaîtra avant lui. »
Selon l’auteur, nous vivons sur une grave illusion : l’accès illimité à l’énergie pétrolière. Or, soutient-il, cette source se tarit, et gravement. Alors que son utilisation se multiplie, notamment à la faveur de l’expansion du parc automobile dans le monde, les réserves s’amenuisent et les découvertes ne suffisent pas à combler les besoins croissants. Si nous n’y prenons garde, ce mirage d’un pétrole éternellement disponible nous réserve un réveil brutal.
Le livre veut susciter une prise de conscience de la place démesurée de cette forme d’énergie depuis son utilisation exponentielle il y a un siècle et l’opacité qui entoure cette industrie, notamment en ce qui concerne les réserves réellement disponibles. Bien des actions menées durant les deux guerres mondiales tournent autour de l’accès à cette énergie. Éric Laurent explique ainsi la coûteuse invasion des armées hitlériennes en Russie par la volonté de faire main basse sur le pétrole russe. La politique étrangère américaine est axée depuis 60 ans sur cette obsession des dirigeants de maintenir un accès continu au pétrole et ainsi de préserver le style de vie étatsunien : renversement du régime laïque iranien en 1953, soutien au régime rétrograde mais allié d’Arabie saoudite, « libération » du Koweït en 1992, invasion de l’Irak en 2002. Autre fait à souligner : la chute de l’Empire soviétique, avance Laurent, s’explique par le pétrole. Les Américains auraient manSuvré pour faire baisser les prix de manière à limiter au maximum les entrées en devises de Moscou, grand producteur d’or noir. Même la Chine s’y met, qui déclare ouvertement que l’énergie est sa priorité absolue.
Le monde occidental doit se préparer à une pénurie de pétrole, voire à une crise énergétique sans précédent. Un cri d’alarme que nous aurions tout avantage à prendre au sérieux.