Avec son huitième roman, La déferlante d’Amsterdam, Yolande Villemaire nous amène au pays de Van Gogh, Vermeer et Rembrandt. La possibilité de se trouver à proximité de tableaux de maîtres ou d’observer les paysages qui les ont inspirés n’est pas le seul avantage qu’offre la Hollande : elle peut aussi servir de refuge à une femme qui fuit son amant.
Ce roman rappelle, par ses paragraphes brefs et très colorés (« L’herbe dorée des dunes, le ciel bleu, quelques nuages, un soleil d’hiver et des vagues qui déferlent, vertes. »), le procédé des impressionnistes, leur manière d’appliquer la couleur en touches juxtaposées. Les non-dits du texte font penser aux blancs que ces peintres laissaient sur les toiles. Miliana Tremblay, une « amazone de ville », livre ses impressions mais jamais tout ce qui la tourmente vraiment. Ainsi, le lecteur ne connaît pas la raison pour laquelle elle a quitté Dragan (dont elle porte l’enfant), sinon que « l’étreinte avait été si intime, si profonde, que Miliana avait atteint les régions les plus lointaines de son âme et qu’elle en était revenue tremblante et glacée jusque dans ses os de femme préhistorique ». Un autre homme la blesse ensuite, mais on n’apprend de lui que quelques détails : « Bavon l’a humiliée. Il s’est montré inquisiteur, elle s’est mise à étouffer, il a dit qu’elle était vraiment trop secrète. Avec un tel mépris qu’elle s’est enfuie ».
Il y a plusieurs questions sans réponse dans le roman, mais cela ne lui enlève rien. Plongés dans un univers coloré, nous longeons les canaux avec Miliana, observons avec elle la nature, les gens dont elle esquisse les portraits. Nous partageons son dépaysement, ressentons son angoisse. Tout au long de cette promenade, et malgré le désir d’oubli qu’éprouve la jeune femme, le souvenir de son amant nous accompagne. Un livre étonnant qui rejoint notre propre fragilité, notre peur d’aimer.