Voici une lecture captivante, particulièrement indiquée pour ceux et celles qui ont à frayer avec le monde des discours critiques, et qui en produisent. Michaël La Chance s’inspire du mythe de la cité Atlantide pour pointer quelques malaises dans la culture actuelle, insulaire dans ses chimères, fascinée par le spectacle jusqu’à lui vouer un culte. « Les Atlantes ont irrité les dieux par l’excès d’ostentation. » D’où la disparition de leur cité.
Penseur en esthétique, Michaël La Chance repère l’Atlantide un peu partout dans notre culture, dans ses utopies, dans son fonctionnement et dans ses impasses. Il articule précisément et brillamment les problèmes du cheminement artistique vers l’exposition, et ceux de la diffusion et de la connaissance des arts. Cinq chapitres examinent ce qu’est devenu l’art de la représentation en relation avec les médias, la science, les nouvelles technologies, l’État et le public. L’auteur s’attache à circonscrire les instances d’autorité en arts, leurs présupposés philosophiques et idéologiques, et les mouvements de pensée qui ont mené à ce qu’il nomme « l’expositionnisme » actuel. Très didactique, il termine chaque chapitre avec la description d’œuvres imaginaires pour exemplifier ses propos. Les questions soulevées sont sujettes à controverses même si elles pourront sembler à certains rétrogrades, par exemple les problèmes que soulève l’attribution des subventions accordées à l’art. Michaël La Chance pense la question en fonction de l’autonomie des créateurs, de la liberté de moyens et de pensée. Il importe aussi d’aborder la place et le rôle de l’art dans la société Atlantide, menacée de couler.
L’emploi du « nous » par l’auteur démontre qu’on ne peut envisager sa culture d’un œil extérieur, position honnête pour une pensée subtile et solide. Si les généralisations sur la culture sont subjectives, elles sont ici bien documentées.