Depuis l’invention du daguerréotype en 1839, la photographie est considérée comme un document d’archives à part entière. Pendant un siècle, elle allait presque exclusivement être en noir et blanc. « [Notre] livre souhaite rendre son éclat à un monde ‘délavé ’ », écrivent les auteurs dans la préface de La couleur du temps. Leur projet : rafraîchir notre regard sur l’Histoire en restituant leurs couleurs aux images du passé. Dan Jones, historien britannique, et Marina Amaral, illustratrice brésilienne, revisitent un peu plus d’un siècle d’histoire, depuis la guerre de Crimée jusqu’à la guerre froide, depuis l’âge de la vapeur jusqu’à celui de la conquête spatiale, depuis l’ère des empires jusqu’à celle des superpuissances.
Après l’examen de quelque 10 000 photos, le choix des images retenues par les auteurs a obéi à deux principes : balayer les continents et les cultures, mêler le célèbre et le méconnu. Au total, l’ouvrage compte 200 reproductions de photos qui, à part une dizaine d’entre elles, ont toutes été tirées du fond de l’agence Getty Images. Les photos sélectionnées sont regroupées en onze chapitres, couvrant chacun une décennie résumée en une expression : l’âge des empires (1850), l’âge des insurrections (1860), l’âge des merveilles (1880), etc. Chaque décennie est illustrée par des portraits de personnalités du temps et par des scènes d’époque (guerres, catastrophes naturelles, famines, manifestations populaires, etc.).
Ces photos ne sont pas toutes inédites. Certaines ont même fait l’objet de plusieurs reproductions dans d’autres publications (la photo des morts de la Commune de Paris en 1870 ou l’incendie du zeppelin Hindenburg en 1937, par exemple, ou encore les portraits connus de Darwin, Einstein ou Hitler). Toutefois, la majorité apporte un témoignage moins répétitif sur l’Histoire.
À signaler – car ce n’est pas souvent la coutume dans ce genre d’ouvrage – les photos sont accompagnées de commentaires très substantiels où Dan Jones, fin vulgarisateur, restitue avec un art consommé de la synthèse à la fois l’enchaînement des événements et l’esprit du temps auxquels renvoient les images. Il réussit même le petit tour de force de faire résonner entre elles des images qui, à première vue, sont sans lien. Pour cette raison et pour le remarquable travail de mise en couleurs, La couleur du temps est un livre à lire autant qu’à regarder.